Les émeutes réactionnaires dans les rues de Dublin ont révélé la menace de l'extrême-droite en Irlande. La gauche et le mouvement syndical doivent s'organiser et se mobiliser pour faire face à cette menace. Nous devons construire d'urgence les forces de la révolution.

Françoise est animatrice EVRAS dans les écoles de l’enseignement francophone. Forte de ses 15 ans d’expérience, elle nous donne son avis sur la polémique qui secoue les écoles en ce moment.

Le CD&V (parti du gouvernement) propose un boycott des produits israéliens en ‘provenance des territoires occupés. Selon le quotidien Le Soir, les produits visés par la proposition de loi, seraient des fruits, des légumes et des cosmétiques… Ecolo, Groen, Vooruit en le PS soutiendraient cette idée. Caroline Gennez (Vooruit), ministre à la Coopération et au Développement appelle, elle aussi, à un boycott des ‘produits israéliens’. Visiblement ils font le choix de faire semblant de lutter contre Israël par ces actes d’une futilité sans nom. Quel est l’intérêt de boycotter des tomates et du maquillages alors qu’apparemment des armes de guerre transitent par la Belgique vers Israël ? N’y a-t-il pas mieux à faire en Belgique pour s’opposer aux plans horribles d’Israël à Gaza ?

L’urgence aujourd’hui consiste à arrêter la machine de guerre sioniste. A notre avis cela passe par un boycott organisé par les organisations des travailleurs de la production, de la commercialisation, de la recherche et de la livraison d’armes, de munitions, de la logistique, de la technologie, et du financement de l'armée d'Israël. Les syndicats dans les ports, les aéroports, du rail sont ici en première ligne pour arrêter la machine destructrice. Les syndicats rouges et verts organisant des travailleurs dans le secteur du transport en Belgique ont déjà pris les devants :

« Les syndicats affirment que du matériel militaire, dont des armes, transiterait par la Belgique. Ce matériel serait à destination d’Israël. Pour l’instant aucune image ne prouve ces affirmations, mais les syndicats auraient récolté de nombreux témoignages : "Ils déchargent des avions qui proviennent des États-Unis", explique Didier Lebbe, secrétaire permanent CNE, "ils déchargent du matériel, se rendent compte que c’est du matériel de guerre."

« Il ne s’agirait pas d’avions militaires, mais bien civils : "On leur demande de charger des avions civils", ajoute le syndicaliste, "ces avions-cargos partent ensuite vers Tel-Aviv".

« En front commun, les syndicats dénoncent cette situation et appellent au boycott : "Nous ne voulons pas participer au crime de guerre qui s’organise dans cette région", dénonce Didier Lebbe, "nous refusons de faire partie de la chaîne d’approvisionnement de ce matériel qui va servir à tuer des civils. Nous ne voulons pas être complices de cela, nous demandons donc à nos affiliés de ne pas charger les avions avec ces armes." (RTBF, 1er Novembre 2023). »

Mais dans les universités et les banques, les travailleurs et les étudiants peuvent aussi prendre l’initiative dans ce sens, pour arrêter les flux d'argent ou la recherche technologique pour la guerre contre Gaza. A côté des manifestations dans les centres ville, il faut aussi envisager des manifestations massives devant les aéroports (comme Bierset près de Liège) et dans les ports comme Zeebruges et Anvers. Comme à Oakland en Californie où des manifestants ont bloqué pendant 9 heures un bâtiment naval militaire américain qui devait partir vers les eaux palestiniennes. Partout dans le monde de plus en plus de syndicats répondent à l’appel des syndicats palestiniens de venir à leur aide. Comme à Gêne en Italie et à Barcelone où les dockers refusent de charger des armes vers Israël et bloquent les cargos à quai. Ou encore comme à Farnborough en Angleterre où des syndicalistes bloquent la production d’armes en faisant grève pour faire pression sur le gouvernement pour qu’il mette fin à sa complicité des crimes de guerre d’Israël. Ou encore comme au Canada chez l’entreprise INKAS. Cette entreprise livre du matériel militaire à l’État sioniste. Fin novembre l’entreprise a été bloquée par des centaines de travailleurs.

Pour les pays les actions n’ont pas encore commencé, il s’agit à très court terme de transformer les communiqués de presse existants en soutien, en actif concret ! L’appel des syndicats palestiniens ne doit pas rester lettre morte ! La solidarité ouvrière internationale est notre meilleure arme dans ce combat contre la colonisation.  Voici le communiqué :

« Cette situation urgente et génocidaire ne peut être évitée que par une augmentation massive de la solidarité mondiale avec le peuple de Palestine et qui peut freiner la machine de guerre israélienne. Nous avons besoin que vous agissiez immédiatement – où que vous soyez dans le monde – pour empêcher l’armement de l’État israélien et des entreprises impliquées dans l’infrastructure du blocus. Nous nous inspirons des mobilisations antérieures des syndicats en Italie, en Afrique du Sud et aux États-Unis, ainsi que des mobilisations internationales similaires contre l’invasion italienne de l’Éthiopie dans les années 1930, contre la dictature fasciste au Chili dans les années 1970 et ailleurs, où la solidarité mondiale a limité l’ampleur de la brutalité coloniale. »

Les syndicats palestiniens proposent les actions suivantes :

– Refuser de fabriquer des armes destinées à Israël. 

– Refuser de transporter des armes vers Israël. 

– D’adopter des motions à cet effet au sein de leur syndicat. 

– De prendre des mesures contre les entreprises complices qui participent à la mise en œuvre du siège brutal et illégal d’Israël, en particulier si elles ont des contrats avec votre institution.  

– Faire pression sur les gouvernements pour qu’ils cessent tout commerce militaire avec Israël et, dans le cas des États-Unis, qu’ils cessent de le financer. 

Du Brésil (avec la CUT et ses plus de 7 millions de membres) au Japon (le syndicat des cheminots avec 1 millions de membres) en passant par les massifs syndicats indiens, une vague de solidarité se lève dans le mouvement ouvrier. Des motions de solidarité appelant à un embargo militaire d’Israël sont votées lors de réunions de syndicalistes. Dans d’autres cas les syndicats et groupes de solidarité passent directement à l’action comme évoqué plus haut.

Un véritable embargo militaire d’Israël et de sa machine de guerre ne peut être mise en œuvre que par le mouvement ouvrier organisé.

Ni une balle, ni un fusil, ni une bombe pour cette guerre !

Mettons fin à la guerre contre la Palestine par un « boycott ouvrier » et des manifestations de masse. Si nous ne les empêchons pas physiquement d’alimenter cette machine de guerre, personne d’autre ne le fera et nous en subirons tous les conséquences désastreuses. Le mouvement ouvrier a déjà mis fin à des guerres par le passé ! Et ce, unilatéralement ! Il le fera encore si nous nous y mettons toutes et tous !

Intifada jusqu’à la victoire !

Révolution jusqu’à la victoire !

Le siège quasi médiéval de la bande de Gaza par l’armée Israélienne, suite à l’attaque de Hamas, a produit une explosion d’indignation dans le monde. Ce sont des millions de personnes qui descendent dans les rues du Brésil et de la Grande Bretagne, des Etats-Unis et du Moyen Orient en passant par la Belgique. Elles sont motivées par l’horreur du pilonnage sans merci et sans répit des Palestiniens par une des armées les plus puissantes au monde mais aussi par un sentiment de révulsion face à l’hypocrisie, c’est à dire la politique de deux poids deux mesures des gouvernements quant il s’agit des Palestiniens ou de l’Etat d'Israël.

Le massacre de Gaza a désormais atteint le chiffre macabre de 10 000 morts, tandis que plus d'un million de personnes ont été déplacées et n'ont nulle part où aller. Pour donner un ordre de grandeur, les Forces de Défense Israéliennes (FDI) ont tué plus de personnes à Gaza en un mois que le nombre total de civils ukrainiens tués au cours des 21 mois qui ont suivi le déclenchement de la guerre en Ukraine en février 2022. Ce dernier chiffre s'élevait à 9 600, selon les estimations du mois dernier.

Dans le processus non linéaire de la lutte des classes, il y a bien des choses qu’on ne peut prédire avec certitude. Mais le soulèvement actuel d’une centaine de milliers d’ouvriers et d’ouvrières à Dhaka était lui largement prévisible.

L’armée israélienne, après beaucoup de tergiversations, a finalement entamé ses opérations terrestres contre Gaza le week-end dernier. Mais il ne s’agit pas d’une offensive tous azimuts. Les chefs militaires israéliens sont bien conscients du risque auquel ils exposeraient leurs propres soldats en les engageant dans des combats urbains. Ils sont aussi attentifs à essayer de ne pas donner au Hezbollah l’excuse dont ils ont besoin pour élargir le conflit et ouvrir un second front au nord, sur la frontière avec le Liban. Qu’est-ce que Netanyahou et ses généraux ont donc derrière la tête ?

D’après le Financial Times, Amir Avivi, l’ancien chef adjoint de la division de Gaza de l’armée israélienne, a déclaré : « Nous ne prenons aucun risque. Quand nos soldats manœuvrent, nous le faisons avec une artillerie massive, avec 50 avions au-dessus qui détruisent tout ce qui bouge. »

Les bombardements se sont effectivement intensifiés vendredi, avec plus de 600 frappes. Cela a fait monter le nombre de morts palestiniens à plus de 8 300, un chiffre qui est malheureusement voué à continuer de grandir.

Langage guerrier

Les déclarations de Netanyahou, de son ministre de la Défense, et de plusieurs politiciens et commentateurs israéliens sont extrêmement belliqueuses, soulignant le fait qu’ils sont en guerre, et que ce n’est pas le moment de parler de « pauses humanitaires » ou de cessez-le-feu. Ils sont déterminés à écraser et détruire le Hamas, quelles qu’en soient les conséquences pour la population civile de Gaza.

Netanyahou a prononcé un discours le 29 octobre, pour annoncer la « seconde étape de la guerre », dans lequel il a déclaré : « Souviens-toi de ce qu’Amaleq t’a fait, est-il écrit dans la Bible ». Et qu’est-ce que Dieu est supposé avoir dit aux anciens Hébreux, d’après le Livre Saint ? Dans le Livre de Samuel (chapitre 15, verset 3), il est écrit : « Maintenant donc, va frapper Amaleq. Vous devrez vouer par interdit tout ce qui lui appartient. Tu ne l’épargneras point. Tu mettras tout à mort, hommes et femmes, enfants et nourrissons, bœufs et moutons, chameaux et ânes ». Dans le Deutéronome (chapitre 25, verset 19), nous pouvons lire : « […] tu effaceras de sous le ciel la mémoire d’Amaleq […] ».

Le vocabulaire de l’Ancien Testament est purement et simplement génocidaire. Il ne s’agit là de rien de moins que de l’extermination totale d’un peuple. Les Amalécites étaient un peuple ancien habitant le désert du Negev, qui sont présentés comme des ennemis acharnés des Hébreux. Et le Dieu des anciens Juifs – le même Dieu qu’adorent aujourd’hui chrétiens et musulmans – n’était pas du genre à « tendre l’autre joue » ou « aime ton prochain comme toi-même ». Non, il était comme toutes les divinités de l’antiquité : un Dieu vengeur et colérique, qui appuyait ses adorateurs lorsqu’ils partaient en guerre. Et c’est cela que Netanyahou invoque aujourd’hui !

Ce langage sanguinaire peut aussi s’expliquer par sa situation politique très fragile. Il est Premier ministre, mais il est de notoriété publique que, s’il y avait eu des élections avant l’attaque du 7 octobre, il aurait perdu son poste. Même après l’attaque, tous les sondages montrent que Netanyahou reste profondément impopulaire et est jugé responsable des graves erreurs des services de renseignement qui ont permis au Hamas de prendre les forces israéliennes par surprise. Une large majorité d’Israéliens souhaite que Netanyahou démissionne dès que la guerre sera finie.

Pour tenter de contrer les critiques qui le visent, il a tenté de rejeter la responsabilité sur d’autres. Dimanche, il a expliqué dans un tweet que les chefs des services de sécurité l’avaient assuré avant l’attaque que tout était sous contrôle en ce qui concernait le Hamas. La réaction du public à ce tweet a été telle, qu’en l’espace de quelques heures, il a été obligé de le supprimer et de présenter des excuses.

Tout le monde sait que le renforcement du Hamas aux dépens de l’Autorité Palestinienne est le résultat de la politique de Netanyahou. Le plus vieux journal d’Israël, Haaretz, a récemment publié un éditorial dénonçant le fait que Netanyahou avait permis le transfert de milliards de dollars au Hamas via le Qatar. Il avait été prévenu qu’il s’agissait d’une stratégie risquée, mais il l’avait fait quand même, car il y voyait une façon de maintenir la division des Palestiniens entre la bande de Gaza et la Cisjordanie, de rendre absolument impossible toute idée d’une solution « à deux Etats » et de poursuivre les annexions de terres palestiniennes.

Maintenant, cette tactique s’est retournée contre lui, et il cherche désespérément à se maintenir au pouvoir. C’est cela qui explique toutes ses poses grandiloquentes pour se présenter comme un « chef de guerre », ainsi que ses citations de l’Ancien Testament sur la nécessité d’annihiler le peuple ennemi.

Netanyahou n’a peut-être pas le pouvoir d’annihiler un peuple entier, mais il est en train de mettre en œuvre le plus grand massacre de Palestiniens que l’on ait jamais vu. Il vaut aussi la peine de s’intéresser à ce que d’autres dirigeants israéliens ont déclaré. Deux figures importantes viennent à l’esprit : Giora Eiland, un chercheur de l’Institut d’Etudes pour la Sécurité Nationale et ancien chef du Conseil de Sécurité Nationale d’Israël ; et Naftali Bennett, qui fut Premier ministre d’Israël entre juin 2021 et juin 2022, ainsi que chef du parti « Nouvelle Droite » de 2018 à 2022.

Voici ce qu’a déclaré Eiland le 12 octobre :

« […] Israël ne peut se satisfaire de rien de moins que l’élimination du Hamas à Gaza en tant qu’organisation militaire et gouvernementale. Tout résultat en deçà serait un échec israélien. […] Une option est de lancer une opération terrestre massive et complexe, sans égard pour son coût ou sa durée, tandis qu’une autre option est de créer des conditions telles que la vie à Gaza devient insoutenable. […] Israël a besoin de créer une crise humanitaire à Gaza, qui force des dizaines de milliers ou même des centaines de milliers de personnes à chercher refuge en Egypte ou dans les pays du Golfe. »

Et si vous pensez que les opinions d’Eiland sont marginales parmi l’élite dirigeante sioniste, il suffit d’observer la catastrophe humanitaire que l’armée israélienne a d’ores et déjà déchaînée sur la population palestinienne de Gaza. Ses mots ont été concrétisés sur le terrain. Le comportement actuel de l’armée israélienne avait été anticipé par Eiland :

« De notre point de vue, tout bâtiment sous lequel nous savons qu’il y a un poste de commandement du Hamas, y compris les écoles et les hôpitaux, est une cible militaire. Tout véhicule circulant à Gaza est considéré comme un véhicule militaire transportant des combattants… ».

Il a même été encore plus loin :

« [L’attaque du 7 octobre] est comparable à l’attaque japonaise contre Pearl Harbor, qui a mené au largage d’une bombe atomique sur le Japon. Par conséquent, Gaza deviendra un endroit où aucun être humain ne peut exister […] il n’y a pas d’autre solution pour assurer la sécurité de l’Etat d’Israël. Nous menons une guerre pour notre existence. »

A nouveau, c’est ce à quoi nous assistons en ce moment à Gaza.

Si vous vous attendiez peut-être à ce genre de langage de la part d’un ex-responsable de la sécurité nationale, écoutez ce que le « politicien » Naftali Bennett (qui est lui-même un colon de Cisjordanie) a à dire. Il prône un « siège complet » de la partie nord de Gaza, recommande que l’armée israélienne « bombarde le Hamas de façon continue dans toute la bande de Gaza », et demande « la création d’une zone de sécurité de 2 kilomètres de profondeur sur le territoire de la bande de Gaza sur l’ensemble de la frontière, une zone permanente. On arriverait à ce résultat par l’utilisation d’une puissance de feu massive, d’attaques terrestres et de travaux d’ingénierie. Imaginez des bulldozers qui aplaniraient tout simplement la zone ».

La « seconde phase » de la guerre

Arriver à ce résultat à l’échelle de tout Gaza n’est, néanmoins, pas si facile. Pour commencer, les Palestiniens ne vont pas rester passifs. Ils résistent comme ils le peuvent, et ils bénéficient de la sympathie des travailleurs et des jeunes de l’ensemble de la planète.

Que se passe-t-il donc sur le terrain, du point de vue militaire ? L’armée israélienne ne va bien sûr pas rendre ses plans publics. Donc, nous devons nous baser sur ce qu’ils font et aussi tenter de comprendre la situation d’après ce que des commentateurs sérieux en disent.

Le ministre de la Défense israélien, Yoav Gallant, a déclaré que l’armée israélienne avait entamé « une nouvelle phase de la guerre ». Ce n’est pas une invasion terrestre tous azimuts. Cette nouvelle phase implique une intensification des bombardements aériens, combinés avec l’entrée dans Gaza d’un nombre limité de blindés et de fantassins. C’est assez logique si on considère à quel point des combats rue par rue, maison par maison seraient sanglants et risqués pour les troupes israéliennes. Leurs troupes seraient ralenties dans une myriade de rues, dont beaucoup sont réduites à l’état de ruines. Dans cette situation, les combattants du Hamas pourraient mener des attaques surprises et des embuscades, y compris en utilisant des armes anti-chars – comme cela a déjà été le cas lors des premières escarmouches.

Les chefs militaires israéliens sont en contact rapproché avec les pontes de l’armée américaine, qui leur prodiguent des conseils sur la base de leur expérience dans la prise de zones densément peuplées, comme ce fut le cas à Mossoul ou à Falloujah. Et comme le signalait un ancien chef du commandement central américain, le général Joseph Votel : « ce seront des combats brutaux, sanglants ». Gallant lui-même a signalé que la guerre pourrait durer des mois. Bennett, que nous avons déjà cité, a été jusqu’à dire que la guerre pourrait durer « entre 6 mois et 5 ans ». Peu importe combien de temps elle durera, il ne s’agira pas d’une opération rapide durant quelques semaines, comme ce fut le cas lors des précédentes invasions de Gaza.

Deux options sont maintenant possibles pour l’armée israélienne : une invasion à grande échelle de Gaza ; ou une campagne plus prolongée, qui reviendrait en fait à assiéger Gaza. Ses chefs espèrent éviter la première option, car ils comprennent qu’elle pourrait facilement déclencher un conflit de plus grande ampleur, en entraînant le Hezbollah dans la guerre. Pour l’instant, celui-ci semble limiter son intervention à des escarmouches de faible intensité, sans déclencher une guerre ouverte.

Le Hezbollah n’est pas une milice dépenaillée. Il dispose de troupes endurcies par son intervention dans la guerre civile syrienne, peut mobiliser entre 30 000 et 50 000 combattants, et dispose d’un arsenal de plus de 100 000 roquettes et missiles. En 2006, l’armée israélienne avait été contrainte à la retraite par le Hezbollah après avoir lancé une invasion précipitée du Sud Liban. La simple menace du Hezbollah a déjà obligé l’armée israélienne à mobiliser près de 100 000 soldats sur sa frontière nord. Les Israéliens préféreraient que les choses en restent là, plutôt que de devoir mener une guerre sur deux fronts.

La menace d’une implication plus large, pas seulement du Hezbollah, mais aussi d’autres forces proches de l’Iran dans la région est réelle. Des bases américaines ont été attaquées en Irak et en Syrie, et les Etats-Unis ont été forcés d’y répondre en bombardant ce qu’ils considèrent comme des bases de milices syriennes et irakiennes soutenues par l’Iran. Le Hamas a en fait déjà lancé un appel à ce que des attaques soient menées contre les intérêts israéliens et américains dans la région, ce qui comprend les bases américaines et tout ce qui est lié à ces deux pays.

Certains groupes en Irak, en Syrie et en Jordanie seraient même prêts à rejoindre la lutte contre Israël à Gaza. Le régime jordanien est soumis à une intense pression et est profondément déstabilisé. Il pourrait même être renversé par un soulèvement de masse. Cela déstabiliserait encore un peu davantage toute la région, et ferait émerger un régime hostile à Israël sur l’autre rive du Jourdain, là où le gouvernement actuel préférerait se tenir à l’écart du conflit pour pouvoir dès que possible renouer des relations normales avec Israël.

Les Etats-Unis font pression pour éviter tout ce qui risquerait d’étendre la guerre et utilisent la question des otages israéliens pour faire pression sur Netanyahou et le gouvernement israélien. Cette question cause aussi des divisions internes dans la société israélienne.

Immédiatement après l’attaque du 7 octobre, les représailles contre le Hamas étaient approuvées par la majorité de la population israélienne, mais cela a changé. Une étude de l’Université Hébraïque de Jérusalem a montré que l’inquiétude pour les otages a fait basculer l’opinion publique, qui préférerait aujourd’hui laisser du temps pour négocier leur libération. De 65 % d’opinions favorables à une offensive terrestre après le 7 octobre, on est passé aujourd’hui à 46 %.

Le Hamas a annoncé qu’il serait prêt à libérer tous les otages qu’il détient, en échange de la libération de tous les Palestiniens détenus dans les prisons israéliennes. Mais il est évident que Netanyahou ne se préoccupe que très peu du sort des otages. Il affirme qu’Israël les libérera par une offensive terrestre. Cela montre que les vies des otages sont le dernier de ses soucis. Sous pression, il a été obligé d’accepter de rencontrer les familles d’otages, mais il ne s’agissait que d’une tactique pour atténuer les critiques qu’il subit.

L’extrême-droite israélienne a été jusqu’à présenter les familles des otages comme des traîtres, car elles osaient demander un cessez-le-feu pour permettre à des négociations de se tenir. Pour ces gens-là, toute concession à ce sujet équivaut à une défaite qui renforcerait le Hamas.

Tout cela explique pourquoi l’armée israélienne préfère l’option d’une campagne prolongée de siège, plutôt qu’une offensive terrestre de grande ampleur.

Leur plan semble impliquer des incursions rapides pour frapper des cibles du Hamas, inciter ses combattants à se montrer et exposer leurs bases et leurs positions de tir, et pouvoir ensuite les bombarder massivement. Le problème, bien sûr, est que le Hamas en est parfaitement conscient et qu’il tentera autant que possible d’opérer en évitant de découvrir ses positions. Tout cela sera sanglant, brutal, et long. Cela signifie que la ville de Gaza va être ravagée et détruite, et qu’il y aura des dizaines de milliers de morts.

Quel avenir pour Gaza ?

Il s’agit là du scénario à court terme, mais quels sont les plans du gouvernement israélien pour Gaza une fois que ce carnage sera terminé ? La réponse est simple : il n’en a aucun. Même des officiels américains ont avoué être choqués par l’absence de toute préparation à ce sujet. Même ravagée, Gaza devrait être administrée et gouvernée par quelqu’un. Mais de qui s’agira-t-il ?

Les Israéliens ont affirmé clairement qu’il ne pouvait pas s’agir du Hamas. Ils préféreraient que l’Autorité Palestinienne s’en charge. Mais Mahmoud Abbas a déjà déclaré qu’il ne rentrerait pas à Gaza sur le dos d’un char israélien. Son pouvoir ne tient plus qu’à un fil, alors que l’Autorité Palestinienne est complètement discréditée auprès de tous les Palestiniens, y compris ceux de Cisjordanie. Il ne peut donc pas apparaître comme prêt à administrer la bande de Gaza pour le compte des Israéliens.

Le ministre israélien de la Défense Gallant a affirmé qu’il y aurait quatre phases dans cette guerre. La première était les trois semaines de bombardements aériens massifs. La seconde est en train de se produire, et implique de découvrir toutes les bases du Hamas, tous ses combattants, toutes ses roquettes et de les détruire. Comme nous l’avons expliqué, cette étape pourrait prendre beaucoup de temps – et même ne jamais être accomplie. Mais ensuite ?

D’après le Times of Israel (29 octobre 2023) :

« […] les militaires se préparent à une troisième phase de combats, durant laquelle ils commenceraient à chercher une nouvelle direction pour l’enclave écrasée, tout en extirpant les “poches de résistance".

« Ce n’est qu’après ce conflit de faible intensité, dont il est estimé qu’il durera plusieurs mois, selon les déclarations de Gallant, qu’Israël entamera la transition vers la dernière phase : la déconnexion d’avec la bande de Gaza […]. »

Qu’est-ce que signifie cette « déconnexion », pour le gouvernement israélien ? Même Gallant ne le sait pas. Le même article souligne :

« A part déclarer qu’après la guerre, Gaza ne sera sous le contrôle ni du Hamas, ni d’Israël, le ministre de la Défense n’a pas précisé ce qu’impliquerait finalement cette déconnexion. […] “Peu importe ce dont il s’agit, ce sera mieux” a déclaré Gallant. »

Si Gallant n’a aucune idée de ce qu’il faudra faire lorsque la guerre sera finie, nous pouvons voir si Naftali Bennett – qui était encore très récemment le Premier ministre d’Israël – peut nous donner une idée de ce à quoi pensent les dirigeants israéliens.

Bennett affirme qu’à court terme les habitants de Gaza doivent soit se déplacer vers le sud de la bande de Gaza – même s’ils sont aussi bombardés là-bas –, soit quitter purement et simplement Gaza et devenir des réfugiés dont d’autres pays auront à s’occuper. Cela équivaut à les menacer d’un nettoyage ethnique de grande ampleur, et éveille les souvenirs de la « Nakba » de 1948, lorsque 750 000 Palestiniens ont été chassés de leurs maisons et de leurs villages.

Bennett en est bien conscient. Il suggère donc que ces déplacements ne seront que provisoires ! Une fois la ville de Gaza totalement détruite, les Palestiniens seraient autorisés à revenir dans les ruines qui étaient autrefois leurs maisons. Israël abandonnerait alors les Palestiniens de Gaza à leur sort, couperait la fourniture d’eau et d’électricité, ainsi que tout commerce avec l’enclave pour l’isoler complètement du monde extérieur.

C’est à cela que ressemblerait la quatrième et dernière phase de cette guerre qui verrait, d’après Gallant, le « retrait de toute responsabilité israélienne pour la vie dans la bande de Gaza et l’établissement d’une nouvelle réalité sécuritaire pour les citoyens d’Israël ». Cela serait garanti, on l’a vu, par une bande de deux kilomètres de profondeur, une sorte de « no man’s land » à l’intérieur même de la bande de Gaza, sur toute sa frontière avec Israël.

Une guerre qui prépare d’autres guerres

Nous nous dirigeons donc vers une guerre longue, qui s’accompagnera de la destruction des infrastructures de Gaza, d’un nombre important de morts civils, et qui sera suivie de l’abandon par Israël de toute responsabilité vis-à-vis de Gaza, laissant les Palestiniens à leur sort. Si les gens qui gouvernent Israël aujourd’hui s’imaginent qu’il s’agit là d’une solution, ils vivent sur une autre planète que la nôtre !

Les analystes sérieux affirment que le Hamas ne peut pas être détruit. Il est possible de tuer beaucoup de ses combattants, de détruire une partie de ses bases, et d’essayer d’éliminer ses dirigeants. Le problème est qu’une bonne partie de sa direction ne se trouve pas à Gaza, mais à l’étranger. La destruction de la ville de Gaza signifie aussi qu’une partie du Hamas et de ses combattants ont préparé des bases dans la partie sud de la bande. L’armée israélienne devra donc continuer la guerre là aussi.

Croire que, dans ces conditions, les Gazaouis accepteraient une administration imposée de l’extérieur et aux ordres d’Israël, c’est prendre ses rêves pour des réalités. Le seul résultat garanti de l’invasion israélienne est qu’une génération entière de Palestiniens va être remplie d’une immense colère. Pour chaque combattant du Hamas tué, dix jeunes seront prêts à prendre les armes lorsque cette guerre-ci sera finie. La scène sera prête pour des conflits encore plus sanglants entre Palestiniens et Israéliens.

Les impérialistes occidentaux en sont parfaitement conscients, mais ils sont dans une position très faible. L’affaiblissement des Etats-Unis est devenu particulièrement visible. La plus puissante nation impérialiste que le monde ait jamais vue, avec sa force immense, plus de 700 bases militaires à travers 80 pays, n’arrive pourtant pas à garder le contrôle de la situation. Tout ce qu’elle peut faire, c’est donner des conseils à Netanyahou, et l’avertir de ne pas aller trop loin, de réfléchir attentivement avant de prendre des risques.

La faiblesse de l’impérialisme américain est aussi évidente au regard de ce qui se passe aux Nations Unies. Des résolutions sont présentées au Conseil de Sécurité par les Russes, les Brésiliens, les Américains et sont toutes bloquées par des vetos, ce qui ne fait que dévoiler aux yeux du monde la véritable nature de cette institution.

L’Assemblée générale a récemment adopté une résolution non-contraignante, soumise par des Etats arabes et appelant à une trêve humanitaire à Gaza, avec 120 votes « pour », 14 « contre », et 45 abstentions. Même si ce vote n’a aucune conséquence concrète, il a néanmoins révélé à quel point les Etats-Unis et leurs alliés sont isolés. Ce vote reflète l’évolution du rapport de forces entre les grandes puissances. Seule une coalition de bric et de broc de 12 pays a en effet soutenu les Etat-Unis et Israël dans leur opposition à cette résolution, et parmi eux se trouvaient des « puissances » telles que l’Autriche, la Hongrie, les Iles Marshall ou les Iles Tonga.

C’est ce qui explique pourquoi Biden est obligé de parler constamment de l’envoi d’aide humanitaire à Gaza, tout en soutenant en pratique le régime israélien. Il a même dû entonner à nouveau la vieille rengaine selon laquelle, lorsque la guerre sera finie, il faudra chercher une solution politique (plutôt que militaire) et qu’il faudra examiner l’option d’une solution à deux Etats.

Il ne s’agit là que de mots, car une solution à deux Etats a été rendue pratiquement impossible par des décennies de colonisation israélienne en Cisjordanie. C’est une question sur laquelle les médias occidentaux préfèrent ne pas s’attarder. Avant l’attaque du Hamas dans le sud d’Israël, l’armée israélienne concentrait ses opérations en Cisjordanie, où elle apportait son appui au grignotage constant des terres palestiniennes par les colons juifs.

Entre janvier et août 2023, plus de 200 Palestiniens ont été tués par l’armée israélienne ou des colons, pour la plupart d’entre eux en Cisjordanie. Cela fait partie d’une campagne systématique pour installer de plus en plus de colonies, au point que les Palestiniens craignent pour leurs vies lorsqu’ils sortent travailler leurs champs. Le simple fait de ramasser des olives dans leurs propres plantations est devenu risqué.

En juin, le gouvernement israélien a approuvé en urgence des milliers de nouveaux logements pour les colons en Cisjordanie. Tout cela se passait avant l’offensive du Hamas en octobre. Depuis, les colons ont profité de la situation pour intensifier leur offensive, avec l’appui de l’armée israélienne. Plus de 100 Palestiniens ont déjà été tués en Cisjordanie depuis le 7 octobre. Loin de ralentir, le programme de colonisation a été intensifié. Aujourd’hui, il est avéré qu’il n’existe déjà plus de territoire palestinien unifié. La solution politique dont parle Biden est donc impossible.

Le cauchemar auquel le peuple palestinien fait face a été préparé par Netanyahou et toute la classe dirigeante sioniste, avec l’appui de l’impérialisme américain, de toutes les puissances occidentales – la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne – et de tous les Etats qui ont rejoint le chœur des partisans du « droit d’Israël à se défendre ».

Lorsqu’ils sont confrontés à une guerre comme celle qui se déroule à Gaza, les marxistes ne s’abaissent pas à essayer de déterminer « qui a commencé ». Nous refusons d’ignorer les 75 années d’occupation brutale qui ont précédé l’attaque du 7 octobre et d’entonner le même air que les impérialistes et les sionistes qui rejettent toute la responsabilité sur le Hamas. Cette logique mène à rejeter sur le peuple de Gaza la responsabilité des souffrances qu’il subit, ce qui revient à accuser la victime d’un crime d’en être responsable.

Ce conflit n’est que le prolongement d’une politique qui précède même l’instauration de l’Etat d’Israël, lors de laquelle 750 000 Palestiniens furent brutalement chassés de leur pays natal. Dans ce conflit, le peuple palestinien a été privé de sa patrie, et a résisté alors qu’une partie croissante de ses terres lui étaient arrachées.

Aujourd’hui, les Palestiniens se voient rappelés plus que jamais au souvenir de la Nakba. La classe dirigeante sioniste n’essaie même plus de cacher qu’elle appuie la colonisation de la Cisjordanie (en particulier). Elle menait cette politique avant le 7 octobre, et elle l’accentue encore aujourd’hui, alors que plus de 700 000 colons juifs sont installés en Cisjordanie, à Jérusalem-Est ou sur le plateau du Golan (un territoire syrien occupé par Israël depuis 1967).

C’est de cela dont il est question dans cette guerre : le peuple palestinien a été assassiné, harcelé, chassé de ses terres, et – à Gaza – réduit au désespoir et enfermé dans une gigantesque prison à ciel ouvert. Les communistes doivent expliquer cette réalité, ils doivent utiliser toutes leurs forces, toute leur énergie, et tous les moyens limités dont nous disposons pour s’opposer au barrage de propagande de la classe capitaliste.

Néanmoins, il ne suffit pas de s’opposer à cette propagande. Il ne suffit pas non plus d’appeler à un cessez-le-feu (que les Israéliens et leurs patrons impérialistes n’ont aucune intention d’accorder de toute façon), et encore moins à une « pause humanitaire », comme le font les perfides dirigeants réformistes et une partie des impérialistes, qui demandent qu’une aide limitée puisse entrer à Gaza, après quoi la boucherie pourra reprendre. Nous, communistes, ne luttons pas pour un retour à la situation précédente, qui a mené à la destruction de Gaza et à des milliers de morts.

Nous devons expliquer que les souffrances du peuple palestinien sont la conséquence du capitalisme. C’est ce système en crise qui produit des guerres, comme en Ukraine ou au Yémen. Elles sont toutes le fruit d’un système qui aurait depuis longtemps dû être mis à bas. Les peuples du Moyen-Orient sympathisent instinctivement avec les Palestiniens et nombre d’entre eux seraient prêts à lutter pour défendre leurs droits.

Mais les cliques dirigeantes de la région, du Caire, de Riyad et d’ailleurs, n’ont aucun intérêt à réellement lutter pour libérer la Palestine. Ils sont eux-mêmes oppresseurs de leur propre peuple et craignent qu’en s’impliquant dans le conflit aux côtés de la Palestine, ils ne provoquent une explosion chez eux, qui mettrait en péril leur pouvoir et leurs privilèges. A en juger par les manifestations massives qui ont éclaté dans le monde arabe en solidarité avec la Palestine, leurs craintes sont justifiées.

Les communistes doivent expliquer qu’une solution à la crise actuelle ne peut être trouvée qu’à travers la lutte des classes, dans toute la région, des travailleurs et des pauvres contre les riches et les puissants, et contre leurs propres gouvernements corrompus. Ce n’est qu’en liant ensemble toutes ces luttes que l’on pourra commencer à mettre sur pied une Fédération Socialiste du Moyen-Orient, qui mettra enfin un terme à des décennies de guerres et de destructions.

L’oppression des Palestiniens est aussi devenue un point de cristallisation pour la colère des jeunes et des travailleurs à travers le monde. C’est vrai même dans les pays impérialistes, où des manifestations de masse ont eu lieu, malgré les calomnies et la répression de la classe dirigeante. Cela fait du conflit actuel un facteur dans la lutte mondiale de la classe ouvrière.

Cet article est paru d'abord sur le site de notre organisation soeur au Canada.


Pour justifier son bombardement génocidaire sur la bande de Gaza, l’État israélien, avec la complicité des impérialistes occidentaux, tente de se présenter comme le gardien de valeurs morales supérieures face à la « barbarie » palestinienne. Il ne pourrait y avoir de meilleur exemple de la banqueroute morale complète de la classe dirigeante.

La guerre contre Gaza atteint une étape cruciale. Les images horribles de civils massacrés ont provoqué une vague de révulsion dans le monde entier. Des milliers de personnes sont descendues dans les rues des capitales du Moyen-Orient pour réclamer une action en faveur de Gaza, tandis que des centaines de milliers de personnes en Occident ont protesté contre la complicité de leurs gouvernements dans les crimes d'Israël.

Les sections francophones de la Tendance marxiste internationale (TMI) t’invitent à l'édition 2023 de l'École marxiste internationale ! L'école aura lieu les 25/26 novembre en ville de Genève. Elle se compose de divers présentations, suivies de discussions, dans le but de préparer la révolution mondiale ! 

Quel était le véritable rôle de l’impérialisme britannique dans la formation de l’État d’Israël ? Quelle était la position de l’Union soviétique et de l’empire américain à l’époque ? Comment les dirigeants de l’OLP (Organisation de libération de la Palestine) ont-ils posé la question de la lutte contre Israël par le passé ? Et quelle solution les marxistes peuvent-ils offrir aux travailleurs palestiniens et israéliens ? Dans ce bref article, écrit en 2002, nous tentons de répondre à ces questions et de développer une perspective.

Ce court article de Karl Marx, publié dans le New York Daily Tribune en 1857, commente la rébellion indienne qui a éclaté la même année contre la Compagnie britannique des Indes orientales. En quelques lignes, Marx dénonce l’hypocrisie de la bonne société anglaise horrifiée par la violence des rebelles alors qu’elle est le produit de décennies d’oppression. Ses propos sont d’une grande pertinence aujourd’hui dans le contexte des événements en Israël-Palestine.

En vivant en Belgique, nous pouvons très vite avoir un sentiment d’impuissance face à l'occupation de Gaza et de la terreur quotidienne infligée aux Palestiniens. Mais nous avons plus de pouvoir que nous ne le pensons, à condition de nous organiser.

Cet article a été rédigé le 8 octobre.

L’attaque du Hamas en Israël hier (7 octobre) a pris de court les renseignements et l’appareil militaire israéliens. Mais elle ne devrait absolument pas nous étonner. C’est la conséquence directe de la répression toujours plus violente des Palestiniens défendue par Netanyahou, qui dirige le gouvernement le plus réactionnaire de l’histoire d’Israël.

Au cours de cet assaut, des milliers de missiles ont été lancés depuis Gaza, dont plusieurs dizaines ont traversé le « Dôme de fer », le système de défense antimissile israélien, tandis que des centaines de combattants du Hamas franchissaient la frontière la plus protégée au monde pour attaquer des villes frontalières et des bases militaires sur le sol israélien. A l’heure où nous écrivons ces lignes, plus de 600 Israéliens ont été tués et plus de 2000 blessés.

Plus de 24 heures après l’assaut initial, les combats se poursuivent dans au moins huit des 22 zones visées par les commandos palestiniens. De nouveaux commandos sont en train de pénétrer en Israël depuis Gaza et enlèvent des dizaines de soldats et civils israéliens pour les emmener à Gaza. Les combattants du Hamas se sont emparés d’une base militaire israélienne, y ont détruit des chars et d’autres équipements militaires, se sont emparés de véhicules militaires et ont capturé des commandants israéliens, parmi lesquels se trouverait Nimrod Aloni, un major-général de l’armée israélienne. Tout cela est sans précédent.

L’Etat israélien a été humilié et sa riposte sera brutale. Netanyahou a proclamé « l’état de guerre » et ordonné des bombardements de représailles, qui ont déjà tué plus de 300 Palestiniens et en ont blessé 1600. Israël a immédiatement coupé l’approvisionnement en électricité de la bande de Gaza, ce qui a de graves conséquences pour les 2,1 millions de civils palestiniens qui vivent sur un territoire où les infrastructures sont déjà très fragiles et le système de santé au bord de l’effondrement.

L’hypocrisie des impérialistes occidentaux


Les dirigeants des gouvernements impérialistes occidentaux parlent désormais du « droit d’Israël à se défendre ». Biden, Macron et les dirigeants réformistes tels que Starmer, en Grande-Bretagne, ont formé un chœur hypocrite pour condamner l’attaque contre Israël, alors qu’ils sont restés bien silencieux, pendant des décennies, face à la brutalité israélienne.

Ils fermaient les yeux lorsque les colons juifs d’extrême droite, en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, attaquaient avec une violence redoublée les quartiers palestiniens, sous le regard cynique de Netanyahou, encouragés par une impunité garantie et par la complicité plus ou moins ouverte des forces de sécurité israéliennes. Les tentatives de jeunes Palestiniens de résister à l’occupation ont rencontré une violence disproportionnée et systématiquement meurtrière de la part de l’armée israélienne, qui se livre à d’innombrables attaques et meurtres ciblés. Un point culminant fut l’assaut brutal contre le camp de réfugiés de Jénine, en juillet. A tout cela s’ajoute la menace constante que les colons armés font peser sur la population palestinienne. Des milliers de jeunes Palestiniens – dont beaucoup de mineurs – de Cisjordanie, de Jérusalem-Est et même d’Israël ont été arrêtés et croupissent en prison, sans l’ombre d’un procès. En revanche, combien de colons coupables de crimes ont été arrêtés ?

Israël est dans une impasse politique depuis le début de l’année 2023. Le pays est secoué par des manifestations de centaines de milliers de personnes contre les réformes judiciaires de Netanyahou. Il y a de profondes divisions au sein de la classe dirigeante sioniste elle-même. La dernière bataille de Netanyahou pour sa propre survie politique a donné une opportunité sans précédent aux suprémacistes juifs, l’extrême droite de Ben Gvir et Bezalel Smortich, qui ont pu sortir au grand jour et se hisser à des postes de pouvoir au sein de l’Etat israélien. Leur programme consiste à provoquer une « nouvelle Nakba », en référence au nettoyage ethnique de la population palestinienne ayant conduit à la proclamation de l’Etat d’Israël en 1948. Il s’agirait cette fois-ci de chasser l’ensemble de la population palestinienne de la Cisjordanie, de Jérusalem-Est, du plateau du Golan et de Gaza.

Les responsables de l’escalade à laquelle nous assistons ne sont autres que Netanyahou et les promoteurs de la dystopie sioniste visant à étouffer un peuple et le chasser de ses terres par un nettoyage ethnique – le tout sans qu’Israël ait à souffrir des conséquences de sa férocité. On ne peut pas priver tout un peuple de ses droits démocratiques fondamentaux, l’écraser et l’opprimer, lui voler toujours plus de terres et de maisons, lui tirer dessus, l’arrêter, le torturer et l’appauvrir sans cesse – sans qu’advienne, un jour ou l’autre, un puissant retour de flamme.

Il y a quelques jours, l’assaut perpétré contre la mosquée Al-Aqsa, à Jérusalem, par une meute de centaines de suprémacistes juifs déclarant vouloir la raser et la remplacer par un temple juif, était une provocation délibérée. Al-Aqsa est considéré comme le troisième site religieux le plus saint de l’Islam. Son attaque par des suprémacistes sionistes était un affront qui a été protégé et soutenu par les forces de police israéliennes. La profanation du site religieux a fourni une justification immédiate à l’attaque que le Hamas a lancée quelques jours plus tard. Ce fait a été volontairement dissimulé par les médias internationaux, qui préfèrent pointer du doigt la « folie meurtrière des Palestiniens ».

Il faut noter que la BBC, par exemple, a annoncé les tirs de roquette du Hamas sans en expliquer le contexte, et notamment les provocations constantes que doit endurer le peuple palestinien. De même, elle donne une très faible couverture médiatique aux attaques physiques commises par les colons contre les Palestiniens en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, et choisit d’occulter le fait qu’avant les événements des deux derniers jours, plus de 200 Palestiniens ont été tués, rien que cette année.

Ceux qui parlent de « terrorisme palestinien » feraient bien de se rappeler que, lorsque les Palestiniens ont entamé un mouvement pacifique de résistance de masse, en 2018, sous le nom de « Grande marche du retour », l’Etat israélien y a répondu en ouvrant le feu à balles réelles, tuant des centaines de manifestants désarmés, dont 46 mineurs. Les mêmes qui parlent aujourd’hui de « terrorisme » sont restés silencieux lors de l’opération « Plomb durci », en 2008-2009, lorsque l’Etat d’Israël a tué 1391 Palestiniens (dont 318 mineurs) et détruit plus de 3500 foyers, laissant des dizaines de milliers de personnes sans abri, et ravagé de nombreuses infrastructures essentielles à Gaza. Ils n’ont rien dit non plus lors de l’opération « Bordure protectrice » en 2014, quand Israël a tué 2203 Palestiniens, dont 1372 n’avaient pas pris part aux hostilités, parmi lesquels 528 mineurs – et détruit ou sévèrement endommagé plus de 18 000 foyers, laissant plus de 100 000 Palestiniens sans domicile. Et il ne s’agit là que de quelques exemples récents.

Tout ceci nous rappelle les mots de Karl Marx dans La Guerre civile en France : « Tout ce chœur de calomnies que le parti de l’ordre ne manque jamais dans ses orgies de sang, d’entonner contre ses victimes, prouve seulement que le bourgeois de nos jours se considère comme le successeur légitime du seigneur de jadis, pour lequel toute arme dans sa propre main était juste contre le plébéien, alors qu’aux mains du plébéien la moindre arme constituait par elle-même un crime. »

Ils présentent la situation comme s’il s’agissait d’une lutte entre deux forces équivalentes. C’est entièrement faux. Il s’agit d’une lutte entre un Etat impérialiste puissant, agressif, et un peuple faible et opprimé qui combat pour se défendre et affirmer son droit à exister en tant que nation.

La clique dirigeante israélienne tente de justifier ses actions sous couvert d’« autodéfense ». Elle cite la Bible : « Œil pour œil, dent pour dent » – et donc « une vie pour vie ». Mais il n’a jamais été question d’une vie pour une vie. Les Israéliens répondent à la mort d’un de leurs citoyens par le massacre de centaines de Palestiniens. Ce sera aussi le cas dans le conflit actuel. Humiliés, les dirigeants israéliens se livreront à une vengeance féroce. Le carnage ne fait que commencer.

L’armée israélienne rassemble des centaines de milliers de soldats à la frontière gazaouie en vue d’éliminer les commandos du Hamas et de reprendre le contrôle de la situation. Netanyahou a menacé de réduire Gaza à l’état de ruines. Cela pourrait conduire à une invasion terrestre de Gaza dans l’objectif de détruire le Hamas, ce qui provoquerait des milliers de victimes civiles supplémentaires. Face à l’échec de sa répression brutale des Palestiniens, Israël répond : « continuons plus fort ! »

La possibilité que le Hezbollah ouvre un second front à la frontière israélo-libanaise inquiète les stratèges militaires israéliens. Le Hezbollah a lancé des missiles dans les fermes de Chebaa, une zone occupée par Israël que se disputent Israël et le Liban. Les représailles modérées lancées par Israël ont été conçues pour éviter une aggravation de la situation. De son côté, le Hezbollah ne semble pas prêt à aller au-delà des gestes de défiance symboliques. Mais le Hezbollah pourrait être forcé de changer de ligne si l’armée israélienne entamait une invasion terrestre de Gaza.

Une chose est sûre : si les forces israéliennes ont les moyens de bombarder, d’étrangler, d’envahir Gaza et de la réduire à l’état de ruines, comme ils l’ont souvent fait par le passé, ils ne pourront pas la maintenir sous occupation. La décision prise par Ariel Sharon de se retirer de Gaza, en 2005, et le fiasco de l’invasion de Gaza, en 2014, ont démontré l’impossibilité de réprimer et soumettre indéfiniment plus de deux millions de personnes par des moyens purement militaires.

Le conflit actuel prouve aussi que l’établissement de l’Autorité palestinienne, après les accords d’Oslo de 1993, n’a été qu’un simulacre destiné à transformer l’ancienne résistance palestinienne – l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) – en une force garantissant la « paix » pour Israël en contrôlant le peuple palestinien. Aussi est-il grotesque d’entendre Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, tenir Israël pour responsable de la crise actuelle alors que la même Autorité palestinienne est engagée dans un partenariat avec Israël pour surveiller et réprimer la jeunesse palestinienne qui se soulève contre l’occupation en Cisjordanie.

En Israël, l’unité affichée par Netanyahou et l’opposition face à cette attaque sans précédent – qui pourrait même pousser les ennemis jurés de Netanyahou, Yair Lapid et Benny Gantz, à rejoindre le gouvernement – ne peut pas masquer les failles qui divisent la classe dirigeante israélienne. Cette mascarade unitaire s’effondrera inévitablement sous l’impact des événements. Toutefois, la capitulation de l’opposition montre que les différences entre le sionisme de droite et le sionisme « de gauche » passent à l’arrière-plan dès qu’il s’agit de l’attitude à adopter face à la lutte nationale palestinienne et à l’occupation.

La culpabilité partagée de l’impérialisme américain et des sionistes


Joe Biden a affiché sa pleine solidarité avec Israël, lui a proposé « tous les moyens de soutien appropriés » et a affirmé que « le soutien de [s]on gouvernement à la sécurité d’Israël est indéfectible et inébranlable ». Naturellement, il n’a pas mentionné le droit des Palestiniens à s’opposer à l’oppression israélienne. Biden navigue en eaux troubles, dans un contexte où le soutien au sionisme et à Israël s’effrite nettement aux Etats-Unis, en raison de l’orientation suprémaciste de Netanyahou. Cependant, on ne pouvait rien attendre d’autre de la part de Biden : les Etats-Unis subventionnent l’armée israélienne à hauteur de 3,6 milliards de dollars par an. Aux yeux des impérialistes américains, Israël est le seul allié auquel ils puissent se fier au Moyen-Orient. Dans les moments décisifs, ils seront toujours aux côtés des sionistes – quelles que soient les critiques qu’ils peuvent leur adresser ici et là.

L’impérialisme américain porte la même responsabilité que les sionistes et Netanyahou dans la situation actuelle, car il a constamment défendu Israël comme un bastion de la « démocratie » (en réalité, comme un allié important de l’impérialisme américain au Moyen-Orient).

Si Biden a adopté un ton légèrement critique à l’égard de Netanyahou, ces dernières années, c’est parce que les politiques insensées de Netanyahou menaçaient d’ébranler la stabilité dans la région et le soutien international à Israël. Cette menace est désormais devenue une réalité aux yeux de tous.

Le conflit actuel ruinera complètement les tentatives de Biden pour négocier un accord entre Israël et la monarchie saoudienne. Cet accord, de même que les accords d’Abraham et l’idée d’une « normalisation » des relations entre les Etats arabes et Israël, ont été anéantis à court terme. Même les dirigeants de l’Arabie saoudite vont devoir tenir compte de la haine à l’égard d’Israël qui s’est accumulée dans les masses saoudiennes – comme dans le reste du monde arabe.

Les stratèges impérialistes les plus sérieux, à Washington, s’inquiètent vivement de la perspective d’une invasion de Gaza, de l’effondrement probable de l’Autorité palestinienne et de l’occupation totale de la Cisjordanie par Israël, qui embraserait l’ensemble du Moyen-Orient. Cette situation annonce une période d’instabilité sociale et de convulsions révolutionnaires.

La détermination et l’organisation dont font preuve les jeunes Palestiniens, qui au cours des deux dernières années ont constitué une nouvelle génération de résistance palestinienne contre l’occupation en Cisjordanie, ont montré la fragilité de tout accord de « paix » qui ne reconnaît pas les droits des Palestiniens.

L’offensive du Hamas a précipité une crise qui murissait de longue date. De fait, la tactique du Hamas consistant à provoquer un affrontement militaire direct avec Israël est en phase avec l’humeur de défiance et de résistance qui se développe dans la jeunesse palestinienne. Les jeunes veulent de l’action – et non des paroles ou des accords qui ne servent qu’à affaiblir leur cause et à renforcer le pouvoir des sionistes. Dans le même temps, l’Etat sioniste, sous la direction de Netanyahou, est en train de se regrouper. Il se sert de la situation actuelle pour déchaîner une frénésie nationaliste contre les Palestiniens, dans l’espoir de renforcer sa base sociale de soutien. Il cherche à rallier à sa cause des couches de la population qui s’étaient massivement mobilisées contre la droite au cours de la dernière période.

Une fois de plus, la population israélienne a été entraînée dans le soutien à l’Etat sioniste et à l’occupation. Le mouvement contre la réforme judiciaire du gouvernement a été immédiatement suspendu. Achim le’Neshek (Frères et sœurs d’armes), un groupe de vétérans anti-Netanyahou qui refusaient jusqu’alors de servir comme réservistes, a déclaré : « Frères et sœurs d’armes exhorte tous ceux qui sont appelés à s’engager dans la défense d’Israël sans hésitation ni délai. »

Cependant, quelques voix critiques prennent des positions courageuses et dénoncent la responsabilité du gouvernement dans cette crise. Une autre organisation d’anciens combattants israéliens, Breaking the Silence, condamne le Hamas – mais accuse « notre gouvernement juif suprématiste » de « nous [avoir] amenés à cette situation ». Ofer Cassif, un député israélien du parti de gauche Hadash, a déclaré : « Je continuerai à dire la vérité : mettez fin au siège brutal et criminel de Gaza et au régime de suprématie juive, car ce sont les responsables de l’effusion de sang. Leur fin seule nous apportera à tous la sécurité, la paix et un avenir meilleur. »

Cependant, de simples paroles de condamnation ne suffisent pas. Seule l’initiative révolutionnaire des masses palestiniennes en Cisjordanie, à Jérusalem-Est, à Gaza et en Israël même, peut marquer un saut qualitatif dans la lutte contre l’occupation. Les masses arabes des pays voisins ont aussi un rôle décisif à jouer. Soutenir la lutte pour la libération nationale des Palestiniens signifie tout d’abord renverser les régimes réactionnaires et pro-impérialistes en Egypte, en Arabie saoudite, au Qatar, en Jordanie, etc. D’une manière ou d’une autre, tous ces régimes bourgeois acceptent le statu quo actuel et redoutent qu’une conflagration révolutionnaire ne les balaye du pouvoir. Aussi, tout en parlant de « solidarité », ils ne font rien de concret pour aider le peuple palestinien.

La solidarité internationale de la jeunesse et de la classe ouvrière est également cruciale pour déterminer l’issue de cette crise, à condition que cette solidarité ne soit pas fondée sur des appels abstraits à « la paix » et à la « désescalade des tensions ». Des décennies de résolutions de l’ONU et d’accords internationaux n’ont pas fait avancer d’un millimètre la cause de la libération nationale des Palestiniens. C’est même le contraire qui s’est produit : ces accords et résolutions ont permis à l’Etat israélien d’occuper une part toujours plus grande des terres palestiniennes. Le mouvement de solidarité doit être clair sur les points suivants :

- Non à l’invasion et au bombardement de Gaza.

- Non à l’ingérence impérialiste. La « paix » impérialiste et les accords d’Oslo ont été un échec pour les Palestiniens.

- Pour un soulèvement de masse contre l’occupation, des deux côtés de la ligne verte.

- En finir avec l’occupation.

- Libération de tous les prisonniers politiques.

- Mettre fin au vol des terres par les colonies sionistes – et restitution de toutes les terres volées.

- Non à l’oppression, pour l’égalité des droits pour tous les peuples, indépendamment de l’ethnie ou de la religion.

- Pour une fédération socialiste de l’ensemble de la Palestine, dans le cadre d’une fédération socialiste du Moyen-Orient.

- Intifada jusqu’à la victoire !

Il est très facile de suivre les traces de la campagne. Des autocollants sur les poteaux, des affiches sur les murs et les fenêtres vous conduisent vers les écoles et les campus de Bruxelles et de Gand, de Louvain et de Leuven, de Mons et d'Anvers. Le message est direct et invitant : « Es-tu communiste ? Alors rejoins-nous. » En néerlandais, en français et en anglais. Une centaine de jeunes ont déjà répondu positivement à notre campagne.

En septembre de cette année, le gouvernement français a lancé une nouvelle offensive idéologique islamophobe. Il a décidé d’interdire l’abaya, un vêtement traditionnel arabe, dans les écoles. L’objectif affiché de cette mesure : lutter contre le communautarisme et faire respecter la « laïcité ». Mais il est de plus en plus flagrant pour tout le monde qu’il ne s’agit que d’une dérive raciste et d’une énième tentative de diversion pour éviter qu’en ce début d’année scolaire, les Français ne parlent des mauvaises conditions d’enseignement et du bilan catastrophique des politiques en la matière de l’ancien ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer.

 

Mais qu’est-ce que l’abaya exactement ?

Selon Euronews, il n'existe pas de texte religieux dans l'Islam qui exige le port de cette tenue. Le 9 février 2018, le cheikh saoudien Abdullah al-Mutlaq indique que le port de l'abaya ne fait pas partie des impératifs religieux pour les femmes musulmanes. Le 2 novembre 2022, le vice-président du Conseil français du culte musulman confirme que l'abaya n'est pas une tenue religieuse mais plutôt une forme de mode vestimentaire. Selon Le Petit Journal, elle est un habit traditionnel des Bédouins devenu plus tard dans la péninsule arabique un symbole religieux islamique valorisant la modestie de la femme, mais elle est aussi perçue comme un héritage culturel différent de la question religieuse.

Ce n’est donc pas un vêtement religieux et il a donc été très difficile pour les directeurs d’établissement scolaire et leur personnel de distinguer une abaya d’un autre vêtement. Ainsi en ce début d’année scolaire, les interdictions d’accéder à l’école se sont faites bien davantage au faciès que sur base du port de l’abaya. Par exemple une fille musulmane a été exclue momentanément de l’école publique car elle portait un pantalon noir et une veste à manche longue…

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Plus ou moins au même moment, lors du dîner de prestige organisé en grande pompe par Macron pour recevoir le roi d’Angleterre, les invités portaient des robes longues couvrant tout le corps et la France conservatrice entière était en admiration devant ce spectacle pourtant si onéreux.

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Lutter contre le communautarisme en excluant des jeunes de l’école ?

 

Il serait intéressant de demander aux représentants du gouvernement français comment ils comptent « lutter contre le communautarisme » en privant des jeunes filles d’un enseignement républicain, les isolant ainsi davantage ? Ou encore comment ils comptent « faire respecter la laïcité » en stigmatisant des musulmans ?

On pourrait aussi leur demander comment ils comptent lutter contre le sexisme et l’oppression des femmes en les privant d’éducation et en leur interdisant de s’habiller comme elles l’entendent ? Que ce soit l’interdiction des crop top ou de l’abaya, dans les deux cas c’est une atteinte aux libertés des femmes.

 

Mais alors pourquoi ?

Pourquoi donc alors le gouvernement bourgeois français sort cette carte hideuse de sa manche lors de la rentrée scolaire ? Car, comme il le fait régulièrement avec le burkini et le voile dans l’espace public, il tente de diviser les Français, de les monter les uns contre les autres pour éviter que ceux-ci ne voient ce qu’ils sont en train de faire grâce à leur système capitaliste exploiteur et inégalitaire. Cette fois-ci particulièrement, il s’agissait d’éviter de parler des vrais problèmes de l’Éducation nationale.

Et si beaucoup sont tombés dans le piège du racisme et de l’islamophobie, d’autres on été bien plus malins, comme certaines directrices d’établissement scolaire qui, alors qu’elles étaient invitées sur les plateaux télés pour répondre à des questions sur l’abaya, ont clairement et patiemment expliqué qu’elles n’étaient pas venues pour parler de cela car ce n’est en rien un problème, mais bien pour parler des problèmes actuels de l’enseignement public en France (qui sont les mêmes qu’en Belgique) : le manque de moyens alloués, le manque de professeurs et le nombre trop élevé d’élèves par classe (selon les sondages IPSOS, plus de la moitié des Français trouvent que l’enseignement « fonctionne mal »).

Et si ces personnes avaient eu davantage de temps de parole, peut-être auraient-elles aussi évoqué les conséquences désastreuses du manque de moyens des services publics en Outre-mer où les classes sont parfois de vraies fournaises l’été et dont certaines sont sujettes à des inondations, à des coupures de courant et aux parasites animaux tellement elles sont mal entretenues et délabrées, tandis que d’autres sont tellement mal desservies par le trop peu de transports en commun que beaucoup de famille rencontrent des difficultés pour s’y rendre. Une véritable « école en sous-France » comme certains l’appelle ironiquement… qui n’est donc même pas en mesure d’accueillir tous les enfants ultramarins puisqu’un certain nombre d’entre eux vivant trop loin et/ou dans des bidonvilles, restent déscolarisés…

 

La nécessité d’un monde socialiste

Finalement, c'est seulement 300 élèves, sur les 12 millions ayant fait leur rentrée cette semaine, qui se sont présentées en abaya devant leur établissement, et 67 d'entre elles ont refusé de la retirer, selon le ministère de l'Education nationale. Cela concerne donc extrêmement peu de personnes au regard du nombre d’enfants que va toucher le sous-financement des écoles publiques… Mais pour la bourgeoisie cette énième « polémique cancer » raciste est du pain béni, et elle le sait pertinemment.

Dans la continuité idéologique du gouvernement raciste français, une directrice de la Haute Ecole EPHEC à Bruxelles a elle aussi tenté d’importer ce débat chez nous en déclarant dans son discours de début d’année que ce vêtement devait être banni des écoles. Une pétition a alors été lancée et a recueilli +- 6 000 signatures pour protester et rappeler que ce genre de mesure va clairement à l’encontre du vivre ensemble.

Mais le mal est fait. Le simple que fait que ce genre de débat s’importe ici de plus en plus souvent montre bien que le système capitaliste a besoin du racisme et du sexisme (et des autres oppressions) pour exister et diviser les travailleurs en même temps qu’il permet aux dirigeants de la classe capitalistes de détourner, par exemple, le débat sur le manque criant de moyens financiers de l’enseignement belge vers d’autres sujets.

Seule une société de type socialiste permettra à la fois de fournir à l’éducation nationale suffisamment de moyens en même temps qu’elle permettra de lutter efficacement contre toute forme d’oppression spécifique en mettant au cœur de ses débats publics la nécessité d’être unis et solidaires dans nos luttes contre la bourgeoisie et le monde qu’elle nous impose. La banalisation et la généralisation de ces dérives racistes ne sont pas sans rappeler ce que les fascistes ont fait en leur temps et personne ne veut goûter à nouveau au lot de souffrances de ce type de société capitaliste, même ceux qui aujourd’hui se laissent gagner par les discours racistes (même s’ils l’ignorent encore).

Samedi 16 septembre à Trieste, des camarades de Sinistra Classe Rivoluzione, la section italienne de la TMI, tenaient un stand dans le cadre de notre campagne « Es-tu communiste? » lorsqu’ils ont été soudainement attaqués par des fascistes qui ont renversé la table et frappé les camarades, avant de s’enfuir. Quelques heures auparavant, la page nationale d’une autre organisation fasciste avait publié l’image d’une affiche de notre campagne.

Lorsque les patrons de Delhaize, aidés par tout l’appareil judiciaire et répressif belge, oblige les travailleurs à s’en tenir à des piquets filtrants en interdisant sous peine d’astreinte les piquets bloquants, ils donnent un coup de massue sur ce qu’il reste de Démocratie en Belgique.

Le vendredi 9 septembre, vers 11 heures, le Maroc a été frappé par un puissant tremblement de terre d'une magnitude de 6,8 sur l'échelle de Richter, selon l'Institut d'études géologiques des États-Unis. L'épicentre se trouvait près d'Oukaïmden, à environ 75 kilomètres au sud-ouest de Marrakech. Des milliers de personnes ont perdu la vie dans une catastrophe dont l'impact a été aggravé par la négligence criminelle et l'incompétence du régime.

Il y a 50 ans, le 11 septembre 1973, un coup d’Etat dirigé par le général Augusto Pinochet renversait le gouvernement de Salvador Allende, consacrant l’échec de la révolution chilienne et plongeant le pays dans une dictature brutale qui dura près de deux décennies et dont la classe ouvrière chilienne ne s’est pas complètement remise, aujourd’hui encore.

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