L’armée israélienne, après beaucoup de tergiversations, a finalement entamé ses opérations terrestres contre Gaza le week-end dernier. Mais il ne s’agit pas d’une offensive tous azimuts. Les chefs militaires israéliens sont bien conscients du risque auquel ils exposeraient leurs propres soldats en les engageant dans des combats urbains. Ils sont aussi attentifs à essayer de ne pas donner au Hezbollah l’excuse dont ils ont besoin pour élargir le conflit et ouvrir un second front au nord, sur la frontière avec le Liban. Qu’est-ce que Netanyahou et ses généraux ont donc derrière la tête ?

D’après le Financial Times, Amir Avivi, l’ancien chef adjoint de la division de Gaza de l’armée israélienne, a déclaré : « Nous ne prenons aucun risque. Quand nos soldats manœuvrent, nous le faisons avec une artillerie massive, avec 50 avions au-dessus qui détruisent tout ce qui bouge. »

Les bombardements se sont effectivement intensifiés vendredi, avec plus de 600 frappes. Cela a fait monter le nombre de morts palestiniens à plus de 8 300, un chiffre qui est malheureusement voué à continuer de grandir.

Langage guerrier

Les déclarations de Netanyahou, de son ministre de la Défense, et de plusieurs politiciens et commentateurs israéliens sont extrêmement belliqueuses, soulignant le fait qu’ils sont en guerre, et que ce n’est pas le moment de parler de « pauses humanitaires » ou de cessez-le-feu. Ils sont déterminés à écraser et détruire le Hamas, quelles qu’en soient les conséquences pour la population civile de Gaza.

Netanyahou a prononcé un discours le 29 octobre, pour annoncer la « seconde étape de la guerre », dans lequel il a déclaré : « Souviens-toi de ce qu’Amaleq t’a fait, est-il écrit dans la Bible ». Et qu’est-ce que Dieu est supposé avoir dit aux anciens Hébreux, d’après le Livre Saint ? Dans le Livre de Samuel (chapitre 15, verset 3), il est écrit : « Maintenant donc, va frapper Amaleq. Vous devrez vouer par interdit tout ce qui lui appartient. Tu ne l’épargneras point. Tu mettras tout à mort, hommes et femmes, enfants et nourrissons, bœufs et moutons, chameaux et ânes ». Dans le Deutéronome (chapitre 25, verset 19), nous pouvons lire : « […] tu effaceras de sous le ciel la mémoire d’Amaleq […] ».

Le vocabulaire de l’Ancien Testament est purement et simplement génocidaire. Il ne s’agit là de rien de moins que de l’extermination totale d’un peuple. Les Amalécites étaient un peuple ancien habitant le désert du Negev, qui sont présentés comme des ennemis acharnés des Hébreux. Et le Dieu des anciens Juifs – le même Dieu qu’adorent aujourd’hui chrétiens et musulmans – n’était pas du genre à « tendre l’autre joue » ou « aime ton prochain comme toi-même ». Non, il était comme toutes les divinités de l’antiquité : un Dieu vengeur et colérique, qui appuyait ses adorateurs lorsqu’ils partaient en guerre. Et c’est cela que Netanyahou invoque aujourd’hui !

Ce langage sanguinaire peut aussi s’expliquer par sa situation politique très fragile. Il est Premier ministre, mais il est de notoriété publique que, s’il y avait eu des élections avant l’attaque du 7 octobre, il aurait perdu son poste. Même après l’attaque, tous les sondages montrent que Netanyahou reste profondément impopulaire et est jugé responsable des graves erreurs des services de renseignement qui ont permis au Hamas de prendre les forces israéliennes par surprise. Une large majorité d’Israéliens souhaite que Netanyahou démissionne dès que la guerre sera finie.

Pour tenter de contrer les critiques qui le visent, il a tenté de rejeter la responsabilité sur d’autres. Dimanche, il a expliqué dans un tweet que les chefs des services de sécurité l’avaient assuré avant l’attaque que tout était sous contrôle en ce qui concernait le Hamas. La réaction du public à ce tweet a été telle, qu’en l’espace de quelques heures, il a été obligé de le supprimer et de présenter des excuses.

Tout le monde sait que le renforcement du Hamas aux dépens de l’Autorité Palestinienne est le résultat de la politique de Netanyahou. Le plus vieux journal d’Israël, Haaretz, a récemment publié un éditorial dénonçant le fait que Netanyahou avait permis le transfert de milliards de dollars au Hamas via le Qatar. Il avait été prévenu qu’il s’agissait d’une stratégie risquée, mais il l’avait fait quand même, car il y voyait une façon de maintenir la division des Palestiniens entre la bande de Gaza et la Cisjordanie, de rendre absolument impossible toute idée d’une solution « à deux Etats » et de poursuivre les annexions de terres palestiniennes.

Maintenant, cette tactique s’est retournée contre lui, et il cherche désespérément à se maintenir au pouvoir. C’est cela qui explique toutes ses poses grandiloquentes pour se présenter comme un « chef de guerre », ainsi que ses citations de l’Ancien Testament sur la nécessité d’annihiler le peuple ennemi.

Netanyahou n’a peut-être pas le pouvoir d’annihiler un peuple entier, mais il est en train de mettre en œuvre le plus grand massacre de Palestiniens que l’on ait jamais vu. Il vaut aussi la peine de s’intéresser à ce que d’autres dirigeants israéliens ont déclaré. Deux figures importantes viennent à l’esprit : Giora Eiland, un chercheur de l’Institut d’Etudes pour la Sécurité Nationale et ancien chef du Conseil de Sécurité Nationale d’Israël ; et Naftali Bennett, qui fut Premier ministre d’Israël entre juin 2021 et juin 2022, ainsi que chef du parti « Nouvelle Droite » de 2018 à 2022.

Voici ce qu’a déclaré Eiland le 12 octobre :

« […] Israël ne peut se satisfaire de rien de moins que l’élimination du Hamas à Gaza en tant qu’organisation militaire et gouvernementale. Tout résultat en deçà serait un échec israélien. […] Une option est de lancer une opération terrestre massive et complexe, sans égard pour son coût ou sa durée, tandis qu’une autre option est de créer des conditions telles que la vie à Gaza devient insoutenable. […] Israël a besoin de créer une crise humanitaire à Gaza, qui force des dizaines de milliers ou même des centaines de milliers de personnes à chercher refuge en Egypte ou dans les pays du Golfe. »

Et si vous pensez que les opinions d’Eiland sont marginales parmi l’élite dirigeante sioniste, il suffit d’observer la catastrophe humanitaire que l’armée israélienne a d’ores et déjà déchaînée sur la population palestinienne de Gaza. Ses mots ont été concrétisés sur le terrain. Le comportement actuel de l’armée israélienne avait été anticipé par Eiland :

« De notre point de vue, tout bâtiment sous lequel nous savons qu’il y a un poste de commandement du Hamas, y compris les écoles et les hôpitaux, est une cible militaire. Tout véhicule circulant à Gaza est considéré comme un véhicule militaire transportant des combattants… ».

Il a même été encore plus loin :

« [L’attaque du 7 octobre] est comparable à l’attaque japonaise contre Pearl Harbor, qui a mené au largage d’une bombe atomique sur le Japon. Par conséquent, Gaza deviendra un endroit où aucun être humain ne peut exister […] il n’y a pas d’autre solution pour assurer la sécurité de l’Etat d’Israël. Nous menons une guerre pour notre existence. »

A nouveau, c’est ce à quoi nous assistons en ce moment à Gaza.

Si vous vous attendiez peut-être à ce genre de langage de la part d’un ex-responsable de la sécurité nationale, écoutez ce que le « politicien » Naftali Bennett (qui est lui-même un colon de Cisjordanie) a à dire. Il prône un « siège complet » de la partie nord de Gaza, recommande que l’armée israélienne « bombarde le Hamas de façon continue dans toute la bande de Gaza », et demande « la création d’une zone de sécurité de 2 kilomètres de profondeur sur le territoire de la bande de Gaza sur l’ensemble de la frontière, une zone permanente. On arriverait à ce résultat par l’utilisation d’une puissance de feu massive, d’attaques terrestres et de travaux d’ingénierie. Imaginez des bulldozers qui aplaniraient tout simplement la zone ».

La « seconde phase » de la guerre

Arriver à ce résultat à l’échelle de tout Gaza n’est, néanmoins, pas si facile. Pour commencer, les Palestiniens ne vont pas rester passifs. Ils résistent comme ils le peuvent, et ils bénéficient de la sympathie des travailleurs et des jeunes de l’ensemble de la planète.

Que se passe-t-il donc sur le terrain, du point de vue militaire ? L’armée israélienne ne va bien sûr pas rendre ses plans publics. Donc, nous devons nous baser sur ce qu’ils font et aussi tenter de comprendre la situation d’après ce que des commentateurs sérieux en disent.

Le ministre de la Défense israélien, Yoav Gallant, a déclaré que l’armée israélienne avait entamé « une nouvelle phase de la guerre ». Ce n’est pas une invasion terrestre tous azimuts. Cette nouvelle phase implique une intensification des bombardements aériens, combinés avec l’entrée dans Gaza d’un nombre limité de blindés et de fantassins. C’est assez logique si on considère à quel point des combats rue par rue, maison par maison seraient sanglants et risqués pour les troupes israéliennes. Leurs troupes seraient ralenties dans une myriade de rues, dont beaucoup sont réduites à l’état de ruines. Dans cette situation, les combattants du Hamas pourraient mener des attaques surprises et des embuscades, y compris en utilisant des armes anti-chars – comme cela a déjà été le cas lors des premières escarmouches.

Les chefs militaires israéliens sont en contact rapproché avec les pontes de l’armée américaine, qui leur prodiguent des conseils sur la base de leur expérience dans la prise de zones densément peuplées, comme ce fut le cas à Mossoul ou à Falloujah. Et comme le signalait un ancien chef du commandement central américain, le général Joseph Votel : « ce seront des combats brutaux, sanglants ». Gallant lui-même a signalé que la guerre pourrait durer des mois. Bennett, que nous avons déjà cité, a été jusqu’à dire que la guerre pourrait durer « entre 6 mois et 5 ans ». Peu importe combien de temps elle durera, il ne s’agira pas d’une opération rapide durant quelques semaines, comme ce fut le cas lors des précédentes invasions de Gaza.

Deux options sont maintenant possibles pour l’armée israélienne : une invasion à grande échelle de Gaza ; ou une campagne plus prolongée, qui reviendrait en fait à assiéger Gaza. Ses chefs espèrent éviter la première option, car ils comprennent qu’elle pourrait facilement déclencher un conflit de plus grande ampleur, en entraînant le Hezbollah dans la guerre. Pour l’instant, celui-ci semble limiter son intervention à des escarmouches de faible intensité, sans déclencher une guerre ouverte.

Le Hezbollah n’est pas une milice dépenaillée. Il dispose de troupes endurcies par son intervention dans la guerre civile syrienne, peut mobiliser entre 30 000 et 50 000 combattants, et dispose d’un arsenal de plus de 100 000 roquettes et missiles. En 2006, l’armée israélienne avait été contrainte à la retraite par le Hezbollah après avoir lancé une invasion précipitée du Sud Liban. La simple menace du Hezbollah a déjà obligé l’armée israélienne à mobiliser près de 100 000 soldats sur sa frontière nord. Les Israéliens préféreraient que les choses en restent là, plutôt que de devoir mener une guerre sur deux fronts.

La menace d’une implication plus large, pas seulement du Hezbollah, mais aussi d’autres forces proches de l’Iran dans la région est réelle. Des bases américaines ont été attaquées en Irak et en Syrie, et les Etats-Unis ont été forcés d’y répondre en bombardant ce qu’ils considèrent comme des bases de milices syriennes et irakiennes soutenues par l’Iran. Le Hamas a en fait déjà lancé un appel à ce que des attaques soient menées contre les intérêts israéliens et américains dans la région, ce qui comprend les bases américaines et tout ce qui est lié à ces deux pays.

Certains groupes en Irak, en Syrie et en Jordanie seraient même prêts à rejoindre la lutte contre Israël à Gaza. Le régime jordanien est soumis à une intense pression et est profondément déstabilisé. Il pourrait même être renversé par un soulèvement de masse. Cela déstabiliserait encore un peu davantage toute la région, et ferait émerger un régime hostile à Israël sur l’autre rive du Jourdain, là où le gouvernement actuel préférerait se tenir à l’écart du conflit pour pouvoir dès que possible renouer des relations normales avec Israël.

Les Etats-Unis font pression pour éviter tout ce qui risquerait d’étendre la guerre et utilisent la question des otages israéliens pour faire pression sur Netanyahou et le gouvernement israélien. Cette question cause aussi des divisions internes dans la société israélienne.

Immédiatement après l’attaque du 7 octobre, les représailles contre le Hamas étaient approuvées par la majorité de la population israélienne, mais cela a changé. Une étude de l’Université Hébraïque de Jérusalem a montré que l’inquiétude pour les otages a fait basculer l’opinion publique, qui préférerait aujourd’hui laisser du temps pour négocier leur libération. De 65 % d’opinions favorables à une offensive terrestre après le 7 octobre, on est passé aujourd’hui à 46 %.

Le Hamas a annoncé qu’il serait prêt à libérer tous les otages qu’il détient, en échange de la libération de tous les Palestiniens détenus dans les prisons israéliennes. Mais il est évident que Netanyahou ne se préoccupe que très peu du sort des otages. Il affirme qu’Israël les libérera par une offensive terrestre. Cela montre que les vies des otages sont le dernier de ses soucis. Sous pression, il a été obligé d’accepter de rencontrer les familles d’otages, mais il ne s’agissait que d’une tactique pour atténuer les critiques qu’il subit.

L’extrême-droite israélienne a été jusqu’à présenter les familles des otages comme des traîtres, car elles osaient demander un cessez-le-feu pour permettre à des négociations de se tenir. Pour ces gens-là, toute concession à ce sujet équivaut à une défaite qui renforcerait le Hamas.

Tout cela explique pourquoi l’armée israélienne préfère l’option d’une campagne prolongée de siège, plutôt qu’une offensive terrestre de grande ampleur.

Leur plan semble impliquer des incursions rapides pour frapper des cibles du Hamas, inciter ses combattants à se montrer et exposer leurs bases et leurs positions de tir, et pouvoir ensuite les bombarder massivement. Le problème, bien sûr, est que le Hamas en est parfaitement conscient et qu’il tentera autant que possible d’opérer en évitant de découvrir ses positions. Tout cela sera sanglant, brutal, et long. Cela signifie que la ville de Gaza va être ravagée et détruite, et qu’il y aura des dizaines de milliers de morts.

Quel avenir pour Gaza ?

Il s’agit là du scénario à court terme, mais quels sont les plans du gouvernement israélien pour Gaza une fois que ce carnage sera terminé ? La réponse est simple : il n’en a aucun. Même des officiels américains ont avoué être choqués par l’absence de toute préparation à ce sujet. Même ravagée, Gaza devrait être administrée et gouvernée par quelqu’un. Mais de qui s’agira-t-il ?

Les Israéliens ont affirmé clairement qu’il ne pouvait pas s’agir du Hamas. Ils préféreraient que l’Autorité Palestinienne s’en charge. Mais Mahmoud Abbas a déjà déclaré qu’il ne rentrerait pas à Gaza sur le dos d’un char israélien. Son pouvoir ne tient plus qu’à un fil, alors que l’Autorité Palestinienne est complètement discréditée auprès de tous les Palestiniens, y compris ceux de Cisjordanie. Il ne peut donc pas apparaître comme prêt à administrer la bande de Gaza pour le compte des Israéliens.

Le ministre israélien de la Défense Gallant a affirmé qu’il y aurait quatre phases dans cette guerre. La première était les trois semaines de bombardements aériens massifs. La seconde est en train de se produire, et implique de découvrir toutes les bases du Hamas, tous ses combattants, toutes ses roquettes et de les détruire. Comme nous l’avons expliqué, cette étape pourrait prendre beaucoup de temps – et même ne jamais être accomplie. Mais ensuite ?

D’après le Times of Israel (29 octobre 2023) :

« […] les militaires se préparent à une troisième phase de combats, durant laquelle ils commenceraient à chercher une nouvelle direction pour l’enclave écrasée, tout en extirpant les “poches de résistance".

« Ce n’est qu’après ce conflit de faible intensité, dont il est estimé qu’il durera plusieurs mois, selon les déclarations de Gallant, qu’Israël entamera la transition vers la dernière phase : la déconnexion d’avec la bande de Gaza […]. »

Qu’est-ce que signifie cette « déconnexion », pour le gouvernement israélien ? Même Gallant ne le sait pas. Le même article souligne :

« A part déclarer qu’après la guerre, Gaza ne sera sous le contrôle ni du Hamas, ni d’Israël, le ministre de la Défense n’a pas précisé ce qu’impliquerait finalement cette déconnexion. […] “Peu importe ce dont il s’agit, ce sera mieux” a déclaré Gallant. »

Si Gallant n’a aucune idée de ce qu’il faudra faire lorsque la guerre sera finie, nous pouvons voir si Naftali Bennett – qui était encore très récemment le Premier ministre d’Israël – peut nous donner une idée de ce à quoi pensent les dirigeants israéliens.

Bennett affirme qu’à court terme les habitants de Gaza doivent soit se déplacer vers le sud de la bande de Gaza – même s’ils sont aussi bombardés là-bas –, soit quitter purement et simplement Gaza et devenir des réfugiés dont d’autres pays auront à s’occuper. Cela équivaut à les menacer d’un nettoyage ethnique de grande ampleur, et éveille les souvenirs de la « Nakba » de 1948, lorsque 750 000 Palestiniens ont été chassés de leurs maisons et de leurs villages.

Bennett en est bien conscient. Il suggère donc que ces déplacements ne seront que provisoires ! Une fois la ville de Gaza totalement détruite, les Palestiniens seraient autorisés à revenir dans les ruines qui étaient autrefois leurs maisons. Israël abandonnerait alors les Palestiniens de Gaza à leur sort, couperait la fourniture d’eau et d’électricité, ainsi que tout commerce avec l’enclave pour l’isoler complètement du monde extérieur.

C’est à cela que ressemblerait la quatrième et dernière phase de cette guerre qui verrait, d’après Gallant, le « retrait de toute responsabilité israélienne pour la vie dans la bande de Gaza et l’établissement d’une nouvelle réalité sécuritaire pour les citoyens d’Israël ». Cela serait garanti, on l’a vu, par une bande de deux kilomètres de profondeur, une sorte de « no man’s land » à l’intérieur même de la bande de Gaza, sur toute sa frontière avec Israël.

Une guerre qui prépare d’autres guerres

Nous nous dirigeons donc vers une guerre longue, qui s’accompagnera de la destruction des infrastructures de Gaza, d’un nombre important de morts civils, et qui sera suivie de l’abandon par Israël de toute responsabilité vis-à-vis de Gaza, laissant les Palestiniens à leur sort. Si les gens qui gouvernent Israël aujourd’hui s’imaginent qu’il s’agit là d’une solution, ils vivent sur une autre planète que la nôtre !

Les analystes sérieux affirment que le Hamas ne peut pas être détruit. Il est possible de tuer beaucoup de ses combattants, de détruire une partie de ses bases, et d’essayer d’éliminer ses dirigeants. Le problème est qu’une bonne partie de sa direction ne se trouve pas à Gaza, mais à l’étranger. La destruction de la ville de Gaza signifie aussi qu’une partie du Hamas et de ses combattants ont préparé des bases dans la partie sud de la bande. L’armée israélienne devra donc continuer la guerre là aussi.

Croire que, dans ces conditions, les Gazaouis accepteraient une administration imposée de l’extérieur et aux ordres d’Israël, c’est prendre ses rêves pour des réalités. Le seul résultat garanti de l’invasion israélienne est qu’une génération entière de Palestiniens va être remplie d’une immense colère. Pour chaque combattant du Hamas tué, dix jeunes seront prêts à prendre les armes lorsque cette guerre-ci sera finie. La scène sera prête pour des conflits encore plus sanglants entre Palestiniens et Israéliens.

Les impérialistes occidentaux en sont parfaitement conscients, mais ils sont dans une position très faible. L’affaiblissement des Etats-Unis est devenu particulièrement visible. La plus puissante nation impérialiste que le monde ait jamais vue, avec sa force immense, plus de 700 bases militaires à travers 80 pays, n’arrive pourtant pas à garder le contrôle de la situation. Tout ce qu’elle peut faire, c’est donner des conseils à Netanyahou, et l’avertir de ne pas aller trop loin, de réfléchir attentivement avant de prendre des risques.

La faiblesse de l’impérialisme américain est aussi évidente au regard de ce qui se passe aux Nations Unies. Des résolutions sont présentées au Conseil de Sécurité par les Russes, les Brésiliens, les Américains et sont toutes bloquées par des vetos, ce qui ne fait que dévoiler aux yeux du monde la véritable nature de cette institution.

L’Assemblée générale a récemment adopté une résolution non-contraignante, soumise par des Etats arabes et appelant à une trêve humanitaire à Gaza, avec 120 votes « pour », 14 « contre », et 45 abstentions. Même si ce vote n’a aucune conséquence concrète, il a néanmoins révélé à quel point les Etats-Unis et leurs alliés sont isolés. Ce vote reflète l’évolution du rapport de forces entre les grandes puissances. Seule une coalition de bric et de broc de 12 pays a en effet soutenu les Etat-Unis et Israël dans leur opposition à cette résolution, et parmi eux se trouvaient des « puissances » telles que l’Autriche, la Hongrie, les Iles Marshall ou les Iles Tonga.

C’est ce qui explique pourquoi Biden est obligé de parler constamment de l’envoi d’aide humanitaire à Gaza, tout en soutenant en pratique le régime israélien. Il a même dû entonner à nouveau la vieille rengaine selon laquelle, lorsque la guerre sera finie, il faudra chercher une solution politique (plutôt que militaire) et qu’il faudra examiner l’option d’une solution à deux Etats.

Il ne s’agit là que de mots, car une solution à deux Etats a été rendue pratiquement impossible par des décennies de colonisation israélienne en Cisjordanie. C’est une question sur laquelle les médias occidentaux préfèrent ne pas s’attarder. Avant l’attaque du Hamas dans le sud d’Israël, l’armée israélienne concentrait ses opérations en Cisjordanie, où elle apportait son appui au grignotage constant des terres palestiniennes par les colons juifs.

Entre janvier et août 2023, plus de 200 Palestiniens ont été tués par l’armée israélienne ou des colons, pour la plupart d’entre eux en Cisjordanie. Cela fait partie d’une campagne systématique pour installer de plus en plus de colonies, au point que les Palestiniens craignent pour leurs vies lorsqu’ils sortent travailler leurs champs. Le simple fait de ramasser des olives dans leurs propres plantations est devenu risqué.

En juin, le gouvernement israélien a approuvé en urgence des milliers de nouveaux logements pour les colons en Cisjordanie. Tout cela se passait avant l’offensive du Hamas en octobre. Depuis, les colons ont profité de la situation pour intensifier leur offensive, avec l’appui de l’armée israélienne. Plus de 100 Palestiniens ont déjà été tués en Cisjordanie depuis le 7 octobre. Loin de ralentir, le programme de colonisation a été intensifié. Aujourd’hui, il est avéré qu’il n’existe déjà plus de territoire palestinien unifié. La solution politique dont parle Biden est donc impossible.

Le cauchemar auquel le peuple palestinien fait face a été préparé par Netanyahou et toute la classe dirigeante sioniste, avec l’appui de l’impérialisme américain, de toutes les puissances occidentales – la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne – et de tous les Etats qui ont rejoint le chœur des partisans du « droit d’Israël à se défendre ».

Lorsqu’ils sont confrontés à une guerre comme celle qui se déroule à Gaza, les marxistes ne s’abaissent pas à essayer de déterminer « qui a commencé ». Nous refusons d’ignorer les 75 années d’occupation brutale qui ont précédé l’attaque du 7 octobre et d’entonner le même air que les impérialistes et les sionistes qui rejettent toute la responsabilité sur le Hamas. Cette logique mène à rejeter sur le peuple de Gaza la responsabilité des souffrances qu’il subit, ce qui revient à accuser la victime d’un crime d’en être responsable.

Ce conflit n’est que le prolongement d’une politique qui précède même l’instauration de l’Etat d’Israël, lors de laquelle 750 000 Palestiniens furent brutalement chassés de leur pays natal. Dans ce conflit, le peuple palestinien a été privé de sa patrie, et a résisté alors qu’une partie croissante de ses terres lui étaient arrachées.

Aujourd’hui, les Palestiniens se voient rappelés plus que jamais au souvenir de la Nakba. La classe dirigeante sioniste n’essaie même plus de cacher qu’elle appuie la colonisation de la Cisjordanie (en particulier). Elle menait cette politique avant le 7 octobre, et elle l’accentue encore aujourd’hui, alors que plus de 700 000 colons juifs sont installés en Cisjordanie, à Jérusalem-Est ou sur le plateau du Golan (un territoire syrien occupé par Israël depuis 1967).

C’est de cela dont il est question dans cette guerre : le peuple palestinien a été assassiné, harcelé, chassé de ses terres, et – à Gaza – réduit au désespoir et enfermé dans une gigantesque prison à ciel ouvert. Les communistes doivent expliquer cette réalité, ils doivent utiliser toutes leurs forces, toute leur énergie, et tous les moyens limités dont nous disposons pour s’opposer au barrage de propagande de la classe capitaliste.

Néanmoins, il ne suffit pas de s’opposer à cette propagande. Il ne suffit pas non plus d’appeler à un cessez-le-feu (que les Israéliens et leurs patrons impérialistes n’ont aucune intention d’accorder de toute façon), et encore moins à une « pause humanitaire », comme le font les perfides dirigeants réformistes et une partie des impérialistes, qui demandent qu’une aide limitée puisse entrer à Gaza, après quoi la boucherie pourra reprendre. Nous, communistes, ne luttons pas pour un retour à la situation précédente, qui a mené à la destruction de Gaza et à des milliers de morts.

Nous devons expliquer que les souffrances du peuple palestinien sont la conséquence du capitalisme. C’est ce système en crise qui produit des guerres, comme en Ukraine ou au Yémen. Elles sont toutes le fruit d’un système qui aurait depuis longtemps dû être mis à bas. Les peuples du Moyen-Orient sympathisent instinctivement avec les Palestiniens et nombre d’entre eux seraient prêts à lutter pour défendre leurs droits.

Mais les cliques dirigeantes de la région, du Caire, de Riyad et d’ailleurs, n’ont aucun intérêt à réellement lutter pour libérer la Palestine. Ils sont eux-mêmes oppresseurs de leur propre peuple et craignent qu’en s’impliquant dans le conflit aux côtés de la Palestine, ils ne provoquent une explosion chez eux, qui mettrait en péril leur pouvoir et leurs privilèges. A en juger par les manifestations massives qui ont éclaté dans le monde arabe en solidarité avec la Palestine, leurs craintes sont justifiées.

Les communistes doivent expliquer qu’une solution à la crise actuelle ne peut être trouvée qu’à travers la lutte des classes, dans toute la région, des travailleurs et des pauvres contre les riches et les puissants, et contre leurs propres gouvernements corrompus. Ce n’est qu’en liant ensemble toutes ces luttes que l’on pourra commencer à mettre sur pied une Fédération Socialiste du Moyen-Orient, qui mettra enfin un terme à des décennies de guerres et de destructions.

L’oppression des Palestiniens est aussi devenue un point de cristallisation pour la colère des jeunes et des travailleurs à travers le monde. C’est vrai même dans les pays impérialistes, où des manifestations de masse ont eu lieu, malgré les calomnies et la répression de la classe dirigeante. Cela fait du conflit actuel un facteur dans la lutte mondiale de la classe ouvrière.

La guerre contre Gaza atteint une étape cruciale. Les images horribles de civils massacrés ont provoqué une vague de révulsion dans le monde entier. Des milliers de personnes sont descendues dans les rues des capitales du Moyen-Orient pour réclamer une action en faveur de Gaza, tandis que des centaines de milliers de personnes en Occident ont protesté contre la complicité de leurs gouvernements dans les crimes d'Israël.

Quel était le véritable rôle de l’impérialisme britannique dans la formation de l’État d’Israël ? Quelle était la position de l’Union soviétique et de l’empire américain à l’époque ? Comment les dirigeants de l’OLP (Organisation de libération de la Palestine) ont-ils posé la question de la lutte contre Israël par le passé ? Et quelle solution les marxistes peuvent-ils offrir aux travailleurs palestiniens et israéliens ? Dans ce bref article, écrit en 2002, nous tentons de répondre à ces questions et de développer une perspective.

Nous publions une lettre qui nous a été envoyée par un camarade de la Tendance Marxiste Internationale qui visite actuellement Beyrouth et est témoin des événements révolutionnaires se déroulant au Liban.


Le 6 octobre, Donald Trump annonçait qu’il s’était entendu avec le président turc, Recep Tayyib Erdogan, pour que les Etats-Unis retirent leurs troupes du Kurdistan syrien. C’était, de facto, un feu vert à une offensive militaire turque dans cette région. Elle a commencé dès le 9 octobre.

Ce tract a été écrit par la Tendance Marxiste Internationale à l’occasion d’une manifestation contre l’invasion du nord de la Syrie par la Turquie. Pour une analyse plus complète de la situation, lire l’article (en anglais) : Turkey attacks Northern Syria: for a revolutionary fightback !

Les frappes américaines, françaises et britanniques contre la Syrie, samedi, sont censées avoir détruit des installations liées à la production d'armes chimiques. Quoi qu'il en soit, les installations visées avaient été préalablement évacuées. Le gouvernement russe avait été prévenu de ces frappes, de façon précise, et en avait lui-même informé le gouvernement syrien.

Depuis la fin du mois de janvier, l’armée turque mène une offensive contre les forces kurdes présentes à Afrin, dans le nord-ouest de la Syrie. Cette opération, cyniquement baptisée « Rameau d’olivier », se déroule avec la passivité complice des grandes puissances.

Le 20 janvier, l’armée turque a engagé une offensive contre les Kurdes des Forces Démocratiques Syriennes (FDS), dans la région d’Afrin (nord-est de la Syrie). Pendant la guerre civile syrienne, les FDS ont pris le contrôle de presque toute la frontière turco-syrienne. C’est ce que ne pouvait accepter le gouvernement turc d’Erdogan, qui livre une guerre féroce aux Kurdes de Turquie.

 

Mercredi 6 décembre, le président américain Donald Trump a déclaré qu’il reconnaîtrait officiellement Jérusalem comme capitale d’Israël. Cela montre la nature réelle des soi-disant pourparlers de paix. Dans un discours prononcé à la Maison-Blanche, Trump a déclaré : « J’ai décidé qu’il était temps de reconnaître officiellement Jérusalem comme la capitale d’Israël. Alors que les précédents présidents en faisaient une promesse de campagne électorale, ils ont échoué à la tenir. Aujourd’hui je tiens cette promesse. Elle marque le début d’une nouvelle approche du conflit entre Israël et les Palestiniens. »

Dans la nuit de jeudi à vendredi dernier, la marine américaine a lancé une série d’attaques de missiles sur la base aérienne de Shayrat, dans la province de Homs, en Syrie. Sept personnes auraient été tuées et plusieurs avions de combat auraient été détruits ou endommagés.

Les images de Syriens victimes de bombardements, à Alep, suscitent l’indignation sincère des peuples du monde entier. Dans les grands médias, par contre, elles font surtout couler des larmes de crocodiles. Les journalistes et politiciens qui se succèdent sur les plateaux de télévision, ces derniers jours, pour condamner solennellement le bombardement d’Alep-Est, ne disent pas un mot des victimes innocentes de l’offensive en cours à Mossoul – ou encore de la guerre ignoble que le régime saoudien mène au Yémen.

La « conférence de paix » pour la Syrie – qui devait se tenir en février – s’est effondrée avant même de commencer. Sur le terrain, la guerre a pris une nouvelle tournure depuis l’entrée de la Russie dans le conflit. Le régime de Damas, qui était en grande difficulté, est passé à l’offensive et a coupé l’une des principales voies de ravitaillement des rebelles depuis la Turquie. Soumis dans le même temps à la pression de l’État Islamique (EI), les rebelles sont au bord de l’effondrement. Le régime a aussi gagné un peu de terrain face à l’EI, notamment au nord d’Alep.

Tout au long de l’année, des centaines de milliers de personnes dans le sud-est de la Turquie ont vu leurs maisons et leurs quartiers détruits par les attaques barbares et indiscriminées des forces armées turques. Des centaines de gens innocents ont été emprisonnés et des centaines d’hommes, de femmes et d’enfants ont été assassinés au cours d’une guerre civile sauvage menée par le régime d’Erdogan contre le peuple kurde de Turquie.

L’attentat qui a frappé une manifestation pour la paix à Ankara, le 10 octobre dernier, a fait plus d’une centaine de morts et plusieurs centaines de blessés. C’est l’attaque terroriste la plus meurtrière de l’histoire de la Turquie. Comme si cela ne suffisait pas, immédiatement après l’attentat, la police a reçu l’ordre de charger les manifestants avec des grenades lacrymogènes et des canons à eau. Quelques heures après, le premier ministre a accusé les manifestants d’avoir organisé eux-mêmes l’attentat pour inciter la population à se soulever contre l’Etat.

Les résultats des élections de dimanche dernier, en Turquie, et la nette défaite de l’AKP, parti du président Recep Tayyip Erdoğan, témoignent d’un changement qualitatif dans la situation du pays, ce qui aura des conséquences pour l’ensemble du Moyen-Orient.

Depuis le 26 mars, des chasseurs saoudiens bombardent des cibles stratégiques au Yémen : grands axes routiers et infrastructures clés. Mi-avril, on dénombrait déjà plus de 500 morts et 1700 blessés. L’Arabie Saoudite est appuyée par une large coalition de pays sunnites, dont l’Egypte, ainsi que par les membres du Conseil de Coopération du Golfe (1), à l’exception de l’Oman.

(Cet article date du 9 octobre)

Les forces de l’Etat Islamique (EI) harcèlent la ville de Kobané, à la frontière turco-syrienne. Des milliers de Kurdes sont passés en Turquie dans le but d’en rapporter des armes et des fournitures. Mais l’armée turque, à la frontière, les en empêche. Sous les yeux du monde entier, la population de Kobané est menacée d’un effroyable bain de sang.

Fin août, une intervention militaire des Etats-Unis et de la France contre la Syrie semblait imminente, annoncée comme telle par les gouvernements américain et français. Hollande et Fabius étaient bien plus virulents qu’Obama. Il fallait "punir" le régime syrien pour l’utilisation d’armes chimiques.

Le grand essor des révolutions dans le monde arabe a attisé les tensions pour le contrôle de la région stratégique du Moyen- Orient et de ses ressources énergétiques. Ces forces sont aussi à l’œuvre pour avorter et faire dérailler les processus révolutionnaires.

tahrirMorsi a été renversé. Une fois de plus, le magnifique mouvement des masses a montré au monde entier le vrai visage du peuple égyptien. Cela prouve que cette révolution, dont beaucoup pensaient – y compris à gauche – qu’elle s’était embourbée, conserve toujours d’immenses réserves sociales. Contrairement à la propagande qui présente la chute de Morsi comme un « coup d’Etat », il s’agissait d’une authentique insurrection populaire d’envergure nationale.

Le régime de Bachar el-Assad est confronté à de nombreuses milices armées et financées par plusieurs puissances étrangères, dont principalement l’Arabie Saoudite, le Qatar et la Turquie.

Début août, des dizaines de milliers d’Egyptiens ont réinvesti les rues du Caire et de la célèbre place Tahrir. Cette mobilisation, la plus importante depuis la chute de Moubarak, marquait une nouvelle étape du processus révolutionnaire.

La vague révolutionnaire qui a déferlé à travers l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient, renversant ou ébranlant les régimes en place, a été vécue comme une catastrophe par les puissances impérialistes.

La résolution 1973 des Nations Unies est, de facto, une déclaration de guerre contre le régime de Kadhafi. Dans le langage hypocrite et mensonger des grandes puissances qui contrôlent l’ONU, cette nouvelle intervention militaire serait motivée par des considérations démocratiques et humanitaires.

Cette semaine, des manifestations ont été organisées pour protester contre le blocus de Gaza et la politique criminelle de l’impérialisme israélien. Unité Socialiste appelle à y participer . Il y aura plus des manifestations la semaine qui vienne et on va a en informer.

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