Ces derniers mois, les offensives de l’extrême-droite se sont multipliées. Elles visent de plus en plus souvent des mobilisations de gauche.
En avril, à Lyon, Génération Identitaire attaquait en plein jour une manifestation LGBT, puis une librairie militante. Le 1er mai à Paris, des militants d’extrême-droite ont fait le coup de poing contre le service d’ordre de la CGT. Une semaine plus tard, des intermittents qui occupaient un théâtre, à Orléans, étaient la cible d’un raid fasciste de l’Action Français
Parallèlement à ces violences physiques, l’extrême-droite élevait la voix, d’une façon très visible, dans deux « tribunes de militaires » publiées par le journal réactionnaire Valeurs Actuelles. De manière générale, les ministres et politiciens bourgeois se sont lancés dans une course aux déclarations sécuritaires, autoritaires et, la plupart du temps, ouvertement racistes [1].
Menace fasciste ?
Est-ce que tout cela constitue – comme certains le craignent à gauche – le signe avant-coureur d’une offensive générale des forces réactionnaires en vue d’instaurer un régime de type fasciste ou bonapartiste (dictatorial) ? Absolument pas. Expliquons pourquoi.
Premièrement, pour défendre son pouvoir et ses privilèges, la bourgeoisie française n’a pas besoin, à ce stade, d’un régime de type fasciste ou bonapartiste. La démocratie bourgeoise est toujours compatible avec ce pouvoir et ces privilèges. C’est d’autant plus vrai que les directions des partis de gauche et du mouvement syndical ne menacent pas la bourgeoisie, ne menacent pas le système capitaliste et cantonnent les luttes massives à des manifestations sans lendemain.
Deuxièmement, jamais les fascistes ou les militaires putschistes n’ont réussi à briser un mouvement ouvrier en phase ascendante. Par le passé, en Italie comme en Allemagne, en Espagne comme au Chili, ils ont achevé des mouvements déjà épuisés par les erreurs et trahisons de leurs directions réformistes ou staliniennes. Or aujourd’hui, en France, nous n’en sommes pas du tout là. La classe ouvrière française commence à peine à se mobiliser ; une tentative de coup d’Etat ne manquerait pas de provoquer une explosion sociale.
Enfin, le fascisme n’est plus que l’ombre de ce qu’il était dans les années 1920 et 1930. Les partis fascistes groupaient alors des centaines de milliers de membres prêts au combat. Depuis, la base sociale traditionnelle du fascisme – la petite bourgeoisie – a énormément fondu, au profit du salariat. Aujourd’hui, les différentes organisations fascistes ne comptent, au total, que quelques milliers de militants actifs. Comparées aux effectifs des grandes organisations du mouvement ouvrier, c’est très peu.
Défendre les droits démocratiques !
Pour autant, on ne doit pas balayer cette question d’un revers de la main, comme s’il n’y avait pas de problème. Avec l’aggravation de la crise, les attaques des fascistes vont se multiplier. Par ailleurs, même si la possibilité d’un régime dictatorial est exclue, à court terme, les attaques contre nos droits démocratiques sont bien réelles : la liberté de manifester est remise en cause, de facto, par les agressions des CRS, des BAC et autres BRAV-M, tandis que la « laïcité républicaine » est utilisée comme une arme pour réprimer des militants syndicaux ou associatifs. De manière générale, la bourgeoisie sait que les mesures d’austérité qu’elle veut imposer, dans la période à venir, vont susciter une forte opposition de la jeunesse et des travailleurs. Elle entend donc se doter à l’avance des moyens de les réprimer.
Face aux agressions des fascistes ou de la police (qui parfois travaillent main dans la main), le mouvement ouvrier ne doit pas en appeler à l’intervention de l’Etat bourgeois : on n’appelle pas le pyromane pour éteindre un incendie. On ne doit compter que sur nos propres forces. Chaque mobilisation doit se doter d’un service d’ordre digne de ce nom. Des militants de confiance doivent être choisis pour organiser des cordons de protection, de façon à défendre les rassemblements et manifestations contre les attaques, d’où qu’elles viennent (police ou extrême-droite).
Ces mesures d’autodéfense sont indispensables, mais sont insuffisantes, en elles-mêmes, face aux attaques de la bourgeoisie. Pour repousser les lois et les mesures liberticides du gouvernement, nous devons mobiliser notre classe à travers une lutte politique. Celle-ci doit être organisée par les partis de gauche, mais aussi par les syndicats, qui sont concernés au premier chef par les attaques contre nos libertés démocratiques.
Les manifestations du 12 juin, à l’initiative de la FI et d’organisations de gauche, sont un premier pas dans cette direction. Révolution appelle ses lecteurs et sympathisants à y participer. Le mouvement syndical – à commencer par la CGT – doit mobiliser toutes ses forces pour garantir le succès de ces manifestations. Dans un deuxième temps, il doit mettre à l’ordre du jour une grève générale de 24 heures pour défendre nos droits, nos libertés démocratiques, mais aussi nos conditions de vie et de travail. Ce serait une étape importante dans le combat pour chasser Macron et sa clique du pouvoir.
[1] Voir notre article Loi séparatisme : une nouvelle provocation islamophobe.