La révolution égyptienne a franchi un cap décisif, ces derniers jours.
Des grèves, parfois accompagnées d’occupations ou de sit-in, se développent dans tout le pays. Les travailleurs interviennent comme une force révolutionnaire indépendante. Dans certains cas, ils expulsent les managers détestés et les dirigeants syndicaux corrompus. La révolte se développe également dans les universités.

Hier, mercredi 9, les travailleurs des télécoms du Caire étaient en grève. La grève semblait gagner d’autres villes, dont Maadi et Alexandrie. Les travailleurs protestent contre la corruption et les bas salaires.

A Suez, des travailleurs du textile occupaient leur usine. Quelque 1000 travailleurs d’une usine Lafarge (ciment) sont en grève. Parmi leurs revendications : le soutien à la révolution et le droit de former des syndicats indépendants.

Le mouvement se répand comme un feu de forêt. Les cheminots de Bani Suweif sont en grève. Au moins deux usines d’armements sont en grève, à Welwyn. Les travailleurs des transports sont entrés dans le mouvement, tout comme les salariés de l’industrie pétrolière qui manifestaient, hier, devant leur ministère. La grève touche désormais les personnels médicaux et la fonction publique en général.

Un mouvement se développe pour chasser les officiels syndicaux appointés par la dictature, qui sont des agents du régime et du patronat. Au Caire, plusieurs groupes importants de travailleurs ont constitué des « comités révolutionnaires » chargés de prendre le contrôle de différentes entreprises – y compris la télévision d’Etat et l’hebdomadaire le plus important d’Egypte, Ros el-Yusuf.

Mercredi, des militants de trois fédérations syndicales indépendantes ont manifesté devant les bâtiments de la Fédération des Syndicats Egyptiens, dont les dirigeants collaborent avec la dictature. Ils ont exigé l’arrestation et le jugement du dirigeant de la Fédération, pour corruption, ainsi que la levée de toute restriction contre le droit de constituer des syndicats libres et indépendants du pouvoir. Des délégations de travailleurs arrivent les unes après les autres, place Tahrir, pour manifester le soutien des salariés à la révolution et discuter de son avenir.

Les journalistes se sont mobilisés. Ils dénoncent leur dirigeant syndical : « assassin, assassin ! » Ils ont manifesté du QG de leur syndicat jusqu’à la place Tahrir. Dans tous les journaux contrôlés par l’Etat, les journalistes se révoltent contre leur direction pro-gouvernementale.

Les événements évoluent d’heure en heure. Mais la conclusion de ces développements est claire : la révolution est entrée dans les usines et les entreprises. La lutte pour la démocratie dans la société se prolonge par une lutte pour la démocratie économique dans les entreprises. La classe ouvrière commence à participer à la révolution sous son propre drapeau, avec ses revendications propres. C’est un tournant et un facteur décisifs pour l’avenir de la révolution.

La nécessité d’une grève générale découle de toute la situation. Les manifestations de masse ne sont pas parvenues à renverser le régime. Le gouvernement – et les impérialistes – avaient l’intention d’enfermer le mouvement place Tahrir, tout en rouvrant les banques, les entreprises, les écoles et la bourse. Ils espéraient que sur fond de « retour à la normale », les manifestants finiraient par se lasser, et que leur nombre finirait par décroître, peu à peu. Mais l’entrée en masse des travailleurs dans le mouvement, par la grève, des sit-in et des occupations, donne un nouvel et puissant élan à la révolution égyptienne. Le développement d’une grève générale sonnerait le glas du régime.

Vive la jeunesse et la classe ouvrière d’Egypte !
Solidarité avec la révolution égyptienne !



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