À l'approche de l'année 2026, Chat GPT compte 700 millions d'utilisateurs hebdomadaires, et un jeune passera en moyenne 25 ans de sa vie à faire défiler des écrans. Cette technologie, issue de la plus grande concentration de capitaux que l'humanité ait jamais connue, est entièrement axée sur le profit, et personne ne sait exactement quels effets elle aura sur notre cerveau à long terme.

Les psychologues avertissent que les cas de « psychose liée à l'IA » sont en augmentation. Ce diagnostic informel fait référence à l'expérience de délires et de paranoïa suite à des interactions prolongées avec des chatbots utilisant des modèles linguistiques à grande échelle (LLM).

Les gros titres dignes de Black Mirror sont de plus en plus fréquents. Aux USA, un adolescent de 16 ans s'est suicidé après avoir eu recours à ChatGPT, d'abord pour obtenir de l'aide dans ses devoirs scolaires, puis pour trouver un soutien émotionnel. Un autre décrit un homme devenu mégalomane après avoir passé 300 heures à converser avec un chatbot, qui l'a convaincu qu'il avait découvert une nouvelle forme de mathématiques capable de faire planter Internet, de créer des champs de force, de léviter et peut-être même de parler aux animaux.

Le PDG d'OpenAI, Sam Altman, s'est exprimé sur X pour « faire part de ses inquiétudes » concernant la dépendance émotionnelle croissante des utilisateurs à l'égard de ChatGPT. Mais les experts révèlent que les choix de conception trompeurs de l'industrie alimentent en fait ces épisodes psychotiques. Afin d'accroître l'engagement, les chatbots ont recours à la « flagornerie IA », ou à des éloges excessifs, pour confirmer les croyances des utilisateurs, même au détriment de la véracité. Sans surprise, cela exploite les tendances addictives et manipule les utilisateurs à des fins lucratives.

Mais ces tactiques ne sont pas propres aux chatbots. Depuis des années, les plateformes de réseaux sociaux suivent nos comportements, compilent des données détaillées sur la manière d'influencer nos décisions et les vendent aux enchérisseurs publicitaires les plus offrants. Instagram, X et TikTok se font concurrence pour capter notre attention dans le but de générer des profits. Plus nous faisons défiler les pages, plus ils collectent de données et plus ils peuvent vendre de publicités. Ils exploitent les mécanismes neurobiologiques fondamentaux pour maximiser l'engagement.

Ces entreprises exploitent la même psychologie qui rend le jeu addictif pour vous rendre accro à votre téléphone. Le modèle « pull to refresh » (tirer vers le bas pour actualiser) imite le fait de tirer le levier d'une machine à sous pour déclencher la dopamine. Le modèle « infinite scroll » (défilement infini) continue de charger du contenu à l'infini pour vous faire défiler plus longtemps. Le modèle « time fog » (brouillard temporel) supprime les horodatages sur les vidéos, transformant ce qui semble être quelques minutes en heures d'absurdité hypnotique. La boucle sans fin du « doomscrolling » a eu un effet dévastateur sur la cognition et la culture de toute une génération.

Déclin cognitif et culturel

Une étude menée par des chercheurs de l'université de Californie à Irvine a révélé que la durée moyenne d'attention en 2004 était de deux minutes et demie. Aujourd'hui, ce chiffre n'est plus que de 47 secondes, soit moins d'un tiers de ce qu'il était il y a deux décennies.

Au cours de la même période, la lecture pour le plaisir a chuté de 40 %. L'année dernière, l'OCDE a signalé que les niveaux d'alphabétisation « diminuaient ou stagnaient » dans la plupart des pays développés. Les résultats en mathématiques, en sciences et en compréhension écrite sont ²également en baisse à l'échelle mondiale.

Le changement cognitif le plus notable s'est produit au milieu des années 2010, lorsque les smartphones se sont largement répandus dans les pays développés. Aujourd'hui, une personne passe en moyenne sept heures par jour devant un écran, tandis qu'un « zoomer » en passe neuf. Le sondage Harvard Youth Poll 2025 a révélé que moins de la moitié des jeunes Américains ont un sentiment d'appartenance à une communauté. En 2023, le même sondage a révélé que six jeunes sur dix trouvent « peu ou pas d'intérêt ou de sens » à leur vie quotidienne.

L'ère des écrans a inauguré une période d'aliénation et de stagnation créative. La mode, le cinéma et les émissions de télévision recyclent sans cesse les décennies passées, illustrant un sentiment omniprésent de nostalgie culturelle. Les livres deviennent moins complexes. Les chansons sont plus courtes, plus répétitives, leurs paroles sont plus simples et véhiculent davantage d'émotions négatives. Il n'est donc pas surprenant que le terme « brain rot » (pourrissement du cerveau) ait été élu mot de l'année 2024 par Oxford.

Quelle est la solution ?

Les jeunes ne sont pas inconscients de leur condition. Un sondage Harris réalisé en 2023 a révélé que 80 % de la génération Z se sentait trop dépendante de la technologie. 60 % d'entre eux souhaiteraient « pouvoir revenir à une époque où tout le monde n'était pas « connecté ». Dans le but de se débarrasser de leurs écrans, les jeunes remettent au goût du jour les téléphones à clapet et créent des clubs « luddites », en référence au mouvement des ouvriers britanniques du XIXe siècle qui détruisaient les machines pour protester contre l'automatisation croissante.

La solution, cependant, ne réside pas dans le boycott individuel, mais dans l'organisation collective. L'intelligence artificielle recèle un potentiel énorme pour accroître la productivité collective de la société sur une base saine, mais seulement si elle est mise en œuvre sous le contrôle démocratique des travailleurs. Une révolution socialiste exploitera cette technologie pour nous libérer de nos corvées quotidiennes. Ce sera le passage de l'humanité du règne de la nécessité au règne de la liberté.

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