Les prix de l'énergie montent en flèche. Ce n'est plus une nouvelle. Mais c'est quand même spectaculaire. À leur apogée, les prix de gros du gaz et de l'électricité étaient plus de quatre fois supérieurs à ceux de l'année précédente. Les conséquences sur nos factures d'énergie sont bien connues. Le journaliste de la VRT Luc Pauwels a calculé qu'une famille moyenne paie désormais 1 500 euros de plus par an.
Le VREG, l'organisme flamand de surveillance de l'énergie, a fait des calculs similaires.
Le contrat annuel d'une famille moyenne pour le gaz et l'électricité s'élève désormais à 5 300 euros, soit près de 450 euros par mois. Soit immédiatement 1 600 euros de plus par an qu'il y a un mois, une augmentation de pas moins de 43% en un mois. Sur une base annuelle, le prix a même augmenté de près de 2 000 euros, soit une hausse de plus de 170 %.
Plus que dans d'autres pays, les prix de l'énergie alimentent l'inflation en Belgique. Ces prix augmentent également deux fois plus vite chez nous La dépréciation monétaire est ici de 6 %. En France, elle n'est que de 3 %. L'une des raisons en est le blocage de l'augmentation du prix de l'énergie à 4% par un gouvernement de droite.
Le Lilliput belge
Le bulletin d'information BusinessAM a une explication à ce sujet.
« Le fait que l'État belge n'ait aucune prise sur le marché de l'énergie est une conséquence douloureuse de la vente par Electrabel des centrales électriques belges aux Français. Après tout, la Belgique n'a aucun contrôle sur le plus grand acteur, et n'intervient pas sur le marché, éventuellement en fixant les prix. »
« Cela contraste fortement avec la France elle-même, siège d'Engie. C'est là que l'État français détient la majorité de parts dans EDF, le propriétaire des centrales nucléaires, et dans GDF Suez, le plus grand acteur du secteur du gaz. Et plus encore : le gouvernement français se contente de fixer des prix maximums, ce dont EDF s'est plaint ces derniers mois, leurs bénéfices étant beaucoup plus modestes que ceux du reste du secteur énergétique en 2021. Mais les effets pour les consommateurs français et l'État se feront sentir : beaucoup moins de factures salées, et une inflation qui reste inférieure à 3 % en France. »
Si le gouvernement belge ne peut pas contrôler les géants de l'énergie, il ne peut s'en prendre qu'à lui-même. Non seulement la Belgique a laissé son joyau économique dans des mains privées, mais elle l'a même confié à des « mains étrangères ». Cela démontre comment les capitalistes belges sont soumis aux capitaux étrangers
La hausse des prix provoque des troubles sociaux et une instabilité politique dans le monde entier. Non seulement en Amérique latine et en Afrique, mais aussi en Europe. Ces hausses agissent comme des détonateurs de situations explosives déjà existantes au sein de la population. Plusieurs études (1) réalisées par des compagnies d'assurance prévoient cette année une poussée des « désordres sociaux ». Au Kazakhstan, nous avons vu comment des hausses de prix brutales ont provoqué un véritable soulèvement de masse de la population. Le gouvernement a été contraint de renoncer à ces augmentations. Au niveau international, la bourgeoisie se prépare à affronter ces tempêtes sociales.
Face à la nervosité croissante de la population, le gouvernement Vivaldi ne pouvait pas rester les bras croisés. Il fallait faire quelque chose. Après de longues négociations, les partis de la coalition ont proposé une série de mesures : une prolongation du taux social étendu, une réduction de la TVA sur l'électricité de 21 à 6 % et une prime de chauffage de 100 euros. Toutefois, ces mesures ne soulageront pas la majorité des ménages. Pour beaucoup, c'est comme une goutte d'eau dans l'océan. De plus, ces mesures entre seulement en vigueur au printemps, après un hiver particulièrement coûteux. Une réduction générale de la TVA de 21 % à 6 %, comme le demande le PTB, est apparemment inenvisageable pour le gouvernement.
‘Surprofits’
Il est maintenant question de s'attaquer aux « surprofits » d'Engie Electrabel. Il s'agit de la branche belge de la multinationale française qui domine le marché. L'expression de « surprofits» désigne le bénéfice « excessif » que le groupe énergétique a réalisé à la suite des fortes augmentations de prix. Il est bien sûr révoltant que ces entreprises fassent des bénéfices supplémentaires grâce à l'augmentation des factures des consommateurs. Mais le bénéfice « ordinaire » est-il alors plus tolérable que le « surprofit » ? Pour nous, le principe même du profit dans le secteur de l’énergie est tout simplement inacceptable.
Grâce aux prix élevés de l'électricité et du gaz, la société française Engie a réalisé un bénéfice de 3,7 milliards d'euros l'année dernière. Le rapport annuel d'Engie Belgium révèle qu'elle a réalisé un bénéfice de près d'un milliard d'euros.
Nationalisation
Cet argent doit être restitué aux consommateurs. Une réduction générale de la TVA ou un gel des prix peuvent sans problème être financés par ce bénéfices. Mais tant qu'il n'y aura pas de contrôle effectif sur la production et la distribution de l'énergie, nous resterons à la merci des caprices lucratifs des géants de l'énergie. Quelle est la meilleure façon de contrôler ces entreprises ? La réponse est : en expropriant les capitalistes de l'énergie et en créant une entreprise publique de l'énergie. Ce n'est qu'alors que les centrales électriques et les réseaux de distribution pourront servir le bien commun. Qui, à gauche de l'échiquier politique, ose relever ce défi aujourd'hui ?