Après les succès de son documentaire I’m not your negro et de son film sur la figure de Patrice Lumumba, le réalisateur Raoul Peck nous livre un nouveau film, le jeune Karl Marx, sorti le 27 septembre sur les écrans français. Disons d’emblée que ce film est bien fait.

Il est riche en citations (correctes !) de la littérature marxiste. Les performances des principaux acteurs – August Diehl (K. Marx), Stefan Konarske (F. Engels), Vicky Krieps (Jenny Marx) et Hannah Steele (Mary Burns) – transmettent une image réaliste des personnalités et de leurs vies. Même le côté « fiction » du long-métrage ne perturbe pas l’ensemble de l’adaptation des personnages historiques. En bref, ce film nous a plu ! Cet article n’ayant pas pour but d’analyser les forces et les faiblesses de l’œuvre cinématographique, nous nous bornerons à en souligner brièvement les éléments politiques les plus intéressants. La révolution de 1848 et, plus généralement, la lutte de classes de cette époque, forment l’arrière-plan du thème principal du film : la rencontre de Karl Marx et Friedrich Engels. Le premier est un jeune et brillant intellectuel persécuté par la Prusse et exilé en France, le deuxième le fils révolté d’un riche industriel allemand. A l’époque, Engels étudie les conditions de vie de la classe ouvrière de Manchester. A leur côté vivent Jenny Von Westphalen, la femme de Marx, et Mary Burns, la compagne d’Engels. Ici, le personnel et le politique se croisent indissolublement, car Jenny et Mary ne sont pas simplement les compagnes de vie des deux révolutionnaires, mais aussi des camarades de lutte. Les deux femmes vont jouer un rôle très important dans le développement du collectif qui donnera naissance au mouvement communiste mondial. Une partie centrale du film est consacrée à l’élaboration, par Marx et Engels, d’un nouveau type de matérialisme, le matérialisme dialectique. Celui-ci ne se développe pas dans les salles fermées du monde académique, mais dans le feu du débat politique, dans le mouvement réel de l’histoire. Les deux révolutionnaires s’orientent depuis le début vers les organisations socialistes et anarchistes du mouvement ouvrier de l’époque. Emblématique est la scène sur la publication de Misère de la philosophie, la réplique de Marx à l’œuvre de Proudhon, Philosophie de la misère. Sans aucun sectarisme, mais à travers une critique implacable, Marx et Engels travaillent dans la « Ligue des Justes ». Ils y luttent contre les positions utopiques et les idées confuses dominantes au sein du mouvement ouvrier. Grâce à ce long travail, parfois difficile et épuisant, Marx et Engels arrivent à fonder la Ligue des Communistes, qui leur confie la tâche de rédiger le célèbre Manifeste du parti communiste. le jeune Karl Marx est donc, au final, une bonne présentation du vieux barbu aux jeunes générations. Profitons-en pour étudier la littérature de ce génie