Les intempéries de cet été ont entraîné des inondations de grande ampleur, comme la Belgique n’en a jamais connu. C’est surtout le sud du pays, Liège et ses environs qui ont subi les ravages des eaux. Plus tard, c’était au tour de Namur et de Dinant d’être touchés. Certaines parties de la Flandre ont également été affectées.

Il s’agit de la plus grande crise humanitaire jamais connue en Wallonie. Quarante et une personnes ont perdu la vie et une personne est toujours portée disparue. 202 des 262 communes et villes de Wallonie ont subi les dégâts des eaux. Un habitant sur 12 en Wallonie, soit 300 000 personnes au total, sont sinistrées. Des milliers de personnes ont perdu leur maison et sont provisoirement hébergées par des voisins, dans des logements sociaux, des hôtels et même dans des conteneurs. Les premiers réfugiés climatiques belges sont un fait. L’étendue des dégâts des eaux n’a pas encore été entièrement déterminée. Mais selon les premières estimations, le coût de la reconstruction des maisons, des écoles, des routes et des entreprises s’élève à au moins 2 milliards d’euros.

Comment cela a-t-il été possible ?

C’est une véritable cascade de phénomènes météorologiques extrêmes qui a perturbé l’été dans le monde entier. Les pluies diluviennes ont provoqué des inondations, tandis que d’autres endroits ont été frappés par des vagues de chaleur mortelles. En Colombie-Britannique (Canada), par exemple, le mercure est monté à 50 degrés en peu de temps. Des vents violents et une sécheresse sévère ont enflammé des zones forestières entières : en France, en Grèce, au Maroc, en Turquie. Ces perturbations majeures du schéma météorologique normal sont le résultat du réchauffement de la planète. Ce réchauffement est clairement d’origine capitaliste. Après tout, ce sont les entreprises qui sont responsables des plus grandes émissions de CO2. Les conséquences catastrophiques pour les humains, les animaux et la nature sont exacerbées par des politiques qui ont démantelé les services publics d’urgence : les sapeurs-pompiers, la protection civile et aussi l’armée. Un héritage amer du gouvernement Michel est la réforme de la protection civile de 2017 qui a réduit de deux tiers les effectifs de ce service vital. Les pompiers ont également vu leurs effectifs réduits. Le numéro deux de l’armée belge, le lieutenant général Marc Thys, évoque même « les années d’érosion des services d’urgence en Belgique ». Il entend par là la réduction délibérée des effectifs humains et matériels de ces services en raison des restrictions budgétaires. Le système d’alerte a également été gravement endommagé. Be-Alert, le service du Centre de crise fédéral, aurait informé les communes du risque élevé d’inondation avec un délai de 24 heures. Erreur humaine ou technique ? Une enquête judiciaire le dira. En tout état de cause, le labyrinthe institutionnel belge a rendu la coordination des différents services d’urgence extrêmement difficile.

Nous soutenons naturellement la proposition d’une enquête parlementaire sur la mauvaise gestion du gouvernement dans cette affaire. Mieux encore, serait une enquête menée par les habitants eux-mêmes et avec l’appui des organisations sociales telles que les syndicats et les comités de quartier.

Erreurs de système

Il est également frappant de constater que les inondations frappent de préférence les plus pauvres. Elles vivent dans des habitations construites dans des quartiers ouvriers proches des berges, à proximité immédiats des entreprises. C’est le cas, par exemple, le long de la Vesdre à Liège. Les familles les plus aisées vivent « sur les hauteurs » dans les quartiers résidentiels éloignés des zones « inondables ».

Il y a ensuite l’aménagement du territoire qui joue un rôle majeur dans les inondations. Le béton et l’asphalte sont deux bons amis du risque d’inondation. En cas de fortes pluies, le sol ne peut plus absorber l’excès d’eau, car la surface est recouverte d’asphalte. En Wallonie, au cours des 30 dernières années, 5 hectares (1 hectare est aussi grand qu’un terrain de football et demi) de sol ont été durcis chaque jour. Après toutes ces années, ce sont des centaines de kilomètres carrés de sol qui ne peuvent plus absorber l’eau. Par conséquent, lorsqu’il y a de grosses pluies, une inondation ravageuse envahit les rues, renversant les voitures, emportant les bâtiments et noyant les gens.

Les compagnies d’assurance, qui ont réalisé des bénéfices de 15 milliards d’euros en Belgique, refusent d’indemniser intégralement les victimes. Ils transfèrent dans une large mesure la responsabilité financière de l’indemnisation au gouvernement wallon. Telle est la signification réelle de ce que le Premier ministre Di Rupo présente comme un « accord secret » entre le gouvernement régional wallon et le lobby des assurances. Une fois de plus, nous voyons comment les compagnies d’assurance essaient principalement d’assurer… leurs propres profits. Ce comportement antisocial mérite une réponse ferme : le gouvernement doit obliger les compagnies d’assurance à payer l’intégralité des dommages ou elles seront expropriées. Nous ne devons pas non plus compter sur le capital privé pour la reconstruction et la réhabilitation du parc immobilier détruit. Le gouvernement wallon ferait bien de mettre en place une régie publique qui effectuerait rapidement les réparations nécessaires et construirait de nouveaux logements sociaux.

Solidarité

Une catastrophe naturelle comme cette inondation a mis en évidence de graves failles systémiques. Dans le même temps, elle a également donné un énorme élan à la solidarité au-delà des frontières linguistiques. Le contraste est saisissant entre l’échec des autorités et l’aide désintéressée de milliers de bénévoles anonymes et spontanés qui nettoient les débris, organisent des cuisines populaires, collectent des meubles et autres articles ménagers et les distribuent gratuitement, offrent un abri, effectuent des réparations, etc. Cette solidarité est la principale bouée de sauvetage dont dispose la classe travailleuse en cas de catastrophe. Cette solidarité sera aussi le moteur de l’indispensable lutte contre le capitalisme.