Cela fait plus de dix jours que les ouvriers de la faïencerie Royal Boch occupent l’usine à La Louvière. ‘Occupation jusqu’au finish’ annoncent les 47 travailleurs qui ont le soutien de leurs syndicats.

La semaine passée le tribunal de commerce de Mons a déclaré la faillite de ce fleuron de l’industrie belge. Depuis novembre l’entreprise fonctionnait sous concordat judiciaire. Mais l’entreprise ne réussissait pas à respecter les engagements de cet accord. « Il y a des commandes pour 850.000 euros mais nous ne pouvons pas produire car la matière première est bloquée à Anvers » explique Manuel Morais du Setca. La matière première n’arrive pas car Royal Boch ne sait pas payer les factures d’un montant total de 2 millions d’euro. La dette totale de la seule faïencerie en Belgique s’élève à 16,285 millions. 12 millions sont aux mains de l’actionnaire principal, le baron Frédéric de Mévius. Il veut récupérer cette somme. « Sans cette créance le passif de Royal Boch serait supportable » analyse les syndicats. « C’est la preuve que le Baron spécule sur la vente de l’entreprise » Un jeu cynique dont le personnel est la victime. Le Baron détient une des plus grandes fortunes du pays. Fin 2004 sa fortune était estimée à 822 millions d’euro. Les syndicats exigent un plan industriel pour faire vivre l’activité. Les patrons privés ne sont pas capables de relancer l’économie. La région wallonne est prête à investir a la hauteur de 49% du capital. L’autre moitié devrait venir d’un ou plusieurs investisseurs privés. Notre préférence va naturellement vers une entreprise 100% publique. Il n’y a aucune raison que l’argent du contribuable ne puisse servir qu’à éponger les dettes des banquiers et autres grosses fortunes.


Il s’agit de la première occupation en Belgique depuis le début de la récession. Forcés par les fermetures d’entreprise les travailleurs se voient obligés de mettre en œuvre des nouvelles formes de luttes. Lorsqu’en Flandre, l’entreprise métallurgique Bekaert annonçait la fermeture de son usine à Hemiksem les travailleurs avaient décidé d’installer un piquet de vigilance devant les portes. Il tiendra pendant deux mois et empêchera le patron de déménager les machines. Une forme de contrôle ouvrier sur l’outil de production. Dans d’autres pays nous voyons aussi des occupations comme en France, en Irlande, en Ukraine et même en Indonésie. L’occupation à Chicago de Republic Windows and Doors en décembre 2008 sera brièvement à la une de la presse mondiale. Certes, il n’y a pas encore beaucoup d’exemples d’occupation d’entreprise dans le monde. Mais elles se font remarquer fortement. Jusqu’il y a peu il s’agissait presque d’un phénomène exclusivement latino-américain. 


Cette forme d’action révèle un changement de la conscience d’une partie des travailleurs et de syndicalistes. Afin de sauver leur emplois les travailleurs sont disposés de remettre en cause ne serait-ce que partiellement et temporairement la sacro-sainte propriété capitaliste de l’entreprise, des machines et des ressources..Nous pensons que chaque entreprise qui menace de fermer doit se voir opposer par les travailleurs une occupation. ‘Usine fermée, usine occupée’ devrait être la consigne des syndicats. La nationalisation sous contrôle ouvrier de l’entreprise devrait être la prochaine étape dans la lutte.


L’occupation de Royal Boch mérite notre solidarité. La solidarité des entreprises de la région est très grande. Nous proposons aux délégations syndicales de venir apporter leur soutien sur place dans les prochains jours. Une manifestation nationale de solidarité est une démarche que les syndicats devraient envisager sérieusement. Encore plus important serait de suivre l’exemple de Royal Boch et d’occuper les autres entreprises que menacent de mettre la clé sous le paillasson.