Dans le monde entier, les femmes sont opprimées. Le 8 mars 2023, une fois de plus, des manifestations, des marches et des rassemblements massifs auront lieu dans de nombreux pays.

Ces dix dernières années, nous avons vu d’immenses mouvements en faveur des droits des femmes, notamment aux Etats-Unis lors de l’investiture de Donald Trump (2017), en Pologne contre la restriction du droit à l’avortement (2020), en Argentine et au Mexique contre les violences faites aux femmes. En 2015, en Irlande, les idées réactionnaires de l’Eglise catholique ont subi une cinglante défaite sur la question du mariage entre conjoints de même sexe. Ce sont autant de signes d’une radicalisation générale dans la société. Les travailleurs, et la jeunesse en particulier, commencent à se mettre en mouvement pour changer leur vie. Ils passent à l’action contre toutes les formes d’oppressions et de discriminations.

La crise du capitalisme a de graves répercussions sur les conditions de vie des femmes. Dans tous les pays, les gouvernements ont systématiquement coupé dans les services sociaux, comme par exemple les crèches, les garderies et les résidences pour personnes âgées. Cela a pour conséquence d’alourdir le fardeau supporté par les femmes – qui assument plus que les hommes, en moyenne, la responsabilité de prendre soin des enfants, des personnes âgées et des personnes dans le besoin.

Du fait de la crise inflationniste, les salaires réels, déjà plus bas chez les femmes que chez les hommes, ne cessent de diminuer. La croissance du chômage et de l’emploi précaire entraînent une détérioration des conditions de vie et une insécurité grandissante pour les travailleuses et les travailleurs, ce qui frappe les femmes de façon disproportionnée. En conséquence, les femmes ont plus de difficultés à garantir leur indépendance financière – et donc à sortir d’une relation conjugale violente.

Les problèmes auxquels font face les femmes ne sont pas « seulement » d’un caractère matériel. Par exemple, l’oppression fait partie intégrante du système judiciaire. Les femmes s’y heurtent à des lois discriminatoires contre l’avortement. Par ailleurs, à l’instar d’autres couches opprimées de la population, les femmes ne sont généralement pas traitées sur un pied d’égalité par le système judiciaire.

L’oppression des femmes est renforcée par la classe dominante à travers l’idéologie, les médias de masse, le système éducatif, etc.

Cette oppression prend aussi la forme de violences faites aux femmes et du harcèlement sexuel. Au Pakistan, les jeunes filles se font violer et les femmes sont victimes de « crimes d’honneur ». Aux Etats-Unis, une femme sur six subit un viol ou une tentative de viol au cours de sa vie, cependant que 99 % des agresseurs restent en liberté.

Tels sont les problèmes auxquels les femmes font face – et contre lesquels elles luttent. Dans le monde entier, des femmes (et des hommes) manifestent pour lutter contre l’oppression, l’intolérance et le sexisme. C’est quelque chose d’extrêmement positif, qui reflète un réveil et une radicalisation.

Ceci dit, la question se pose : comment lutter efficacement contre l’oppression et les inégalités ?

Un point de vue de classe

La Tendance Marxiste Internationale (TMI) soutient toutes les revendications en faveur de l’égalité. Nous luttons contre l’oppression des femmes et de toutes les autres couches opprimées. Selon nous, cependant, la lutte pour la libération des femmes ne peut pas être déconnectée de la lutte contre le capitalisme, parce que l’oppression des femmes est inhérente à la société de classes. On ne peut donc combattre cette oppression que dans le cadre de la lutte des classes en général.

C’est l’Internationale socialiste qui, en 1910, a déclaré le 8 mars « Journée internationale des femmes » : une journée consacrée aux revendications des travailleuses. A l’époque, l’un des enjeux principaux était le droit de vote des femmes. Les femmes de la classe dirigeante et de la petite bourgeoisie, qui à l’époque dirigeaient le mouvement des femmes, considéraient la lutte pour le droit de vote comme une fin en soi, tandis que le mouvement ouvrier considérait le droit de vote comme un moyen de se battre pour l’égalité et l’émancipation authentique de toutes les femmes. C’est pourquoi les initiatrices de la « Journée internationale des femmes » insistaient sur l’idée que c’était la Journée des femmes travailleuses.

Pour les femmes des classes supérieures, la lutte pour l’égalité était une lutte pour partager les privilèges des hommes de leur classe : le droit d’être avocates, médecins, Premières ministres et PDG. Bien sûr, nous défendons le droit des femmes d’exercer toutes les professions qu’exercent les hommes. Mais en même temps, nous savons que pour la grande majorité des femmes, cela ne change rien. Margaret Thatcher, au Royaume-Uni, et Angela Merkel, en Allemagne, n’ont pas amélioré le sort des femmes, bien au contraire. En Italie, le gouvernement dirigé par Giorgia Meloni attaque les travailleurs et les travailleuses. De même, si Hillary Clinton avait été élue présidente des Etats-Unis, en 2016, les conditions de vie des femmes américaines n’auraient pas été améliorées d’un iota – pas plus, d’ailleurs, que le sort des femmes des pays victimes des interventions impérialistes américaines.

La carrière des femmes politiciennes, PDG, cadres supérieures, etc., se construit sur le dos du travail faiblement rémunéré des femmes qui font leur ménage, font leur cuisine et s’occupent de leurs enfants. Les femmes de l’élite de la société sont toutes en faveur de l’égalité – jusqu’à ce que les travailleuses mal payées qui leur permettent d’avoir une carrière commencent à demander des augmentations de salaire et des améliorations de leurs conditions de travail.

Beaucoup de progrès ont été réalisés depuis la première Journée internationale des femmes, en 1910. Dans beaucoup de pays, les femmes ont gagné le droit de vote, le droit à l’éducation et des lois qui interdisent les violences envers les femmes. Dans de nombreux pays, il y a des lois en matière d’équité salariale. Et pourtant, nous n’avons pas atteint l’égalité véritable. Même dans les pays où règne l’égalité complète devant la loi, les femmes sont toujours victimes de violences et d’oppression. Partout, elles sont toujours nettement moins payées que les hommes. L’égalité formelle – devant la loi – ne permet pas de s’attaquer à la racine du problème et, en elle-même, ne peut pas résoudre le problème. L’oppression, le harcèlement, la violence, le sexisme et la bigoterie plongent leurs racines dans la société de classes.

« Diviser pour mieux régner »

Le capitalisme est un système fondé sur l’exploitation de la classe ouvrière. Une petite couche, au sommet de la société, s’enrichit grâce au travail impayé des travailleuses et des travailleurs (le profit). Pour cette minorité, la seule façon de se maintenir au pouvoir est de recourir à la vieille tactique : « diviser pour mieux régner ». Les classes dirigeantes divisent les travailleurs suivant des lignes nationales, religieuses, d’orientation sexuelle, de genre, etc. A travers les médias, ils font tout pour semer la haine et le chauvinisme. La seule façon de combattre ce poison, c’est l’unité de la classe ouvrière et les méthodes de la lutte des classes, c’est-à-dire les manifestations, les grèves et les mobilisations de masse.

Le capitalisme est dans une impasse. Il n’offre aucune issue aux travailleurs et à la jeunesse. En 2017, Oxfam calculait que huit multi-milliardaires détenaient autant de richesses que la moitié la plus pauvre de la population mondiale. Le problème n’est pas que ces huit personnes sont des hommes. Le problème, c’est le système qui concentre la richesse dans des mains de moins en moins nombreuses, tandis que les conditions de vie de la majorité s’aggravent.

Cette situation entraîne une colère et une frustration généralisées. Dans un nombre croissant de pays, les travailleurs et la jeunesse descendent dans la rue. Mais ces manifestations ont un caractère différent de ce qu’on a vu par le passé. Lors du boom d’après la Deuxième Guerre mondiale (les soi-disant « Trente glorieuses »), le système capitaliste pouvait octroyer des réformes aux travailleurs. Aujourd’hui, les réformes progressistes ne sont plus à l’ordre du jour. Au contraire : l’heure est, partout, aux contre-réformes drastiques.

Les peuples commencent à s’en rendre compte. Il y a un sentiment général de ne plus pouvoir supporter l’ordre social actuel. Les manifestants n’avancent pas seulement des revendications concrètes ; ils demandent aussi le droit à la dignité et au respect. Nous l’avons vu lors du Printemps arabe, en 2011. Les femmes égyptiennes, par exemple, ont joué un rôle important dans la lutte pour renverser Hosni Moubarak, et cette lutte a aussi modifié les relations entre les hommes et les femmes. Nous l’avons aussi vu en France dans le mouvement des Gilets jaunes, auquel de nombreuses femmes ont participé. Il est clair que les choses changent quand les couches les plus opprimées, notamment les femmes, entrent en action et se placent en première ligne de la lutte.

Révolution socialiste !

La crise du capitalisme déstabilise la société ; celle-ci se désagrège, et la culture aussi se détériore. La classe dominante, prête à tout pour s’accrocher au pouvoir, s’appuie de plus en plus sur le sexisme, le racisme et d’autres formes de poison pour semer la division.

Ceci dit, le capitalisme ne va pas disparaître de lui-même. Il doit être renversé par une révolution socialiste. Celle-ci instaurerait une économie démocratiquement planifiée, qui jetterait les bases matérielles permettant d’en finir avec les inégalités et l’oppression. Dans une économie démocratiquement planifiée, la richesse produite le serait au profit de la majorité – et non plus d’une minorité richissime. La durée de la semaine de travail diminuerait immédiatement, ce qui donnerait aux femmes et aux hommes le temps de participer au fonctionnement de la société. Les ressources nécessaires seraient allouées à l’assistance sociale. Des investissements massifs seraient mobilisés pour en finir avec le fardeau des tâches domestiques, par exemple en fournissant des garderies, un système de santé et d’éducation accessibles et gratuits, un service de restauration publique bon marché et de grande qualité, des services publics de nettoyage, etc.

Cela poserait les bases matérielles d’une société dans laquelle les femmes et les hommes seraient réellement libres de réaliser tout leur potentiel, sans contraintes matérielles. Lorsque les bases matérielles des inégalités et de l’oppression disparaîtront, le chauvinisme, le sexisme et autres fléaux commenceront à s’estomper pour, finalement, disparaître complètement.

La lutte pour les droits des femmes, la lutte pour l’égalité, est une lutte pour la libération de toute l’humanité, une lutte pour la révolution socialiste !