La politique belge, et en particulier la politique flamande, semble  avoir embarqué dans la machine à remonter le temps du professeur Barabas,  pour un retour aux années 50. Car c’est bien une nouvelle ‘Peur du rouge’ qui naît dans les médias, une sorte de Mccartysme du XXIe siècle. Le PTB/PVDA est la cible d’attaques aussi persistantes que superficielles. Après les critiques infantiles de Paul Magnette et d’Yvan Mayeur, c’est au tour des éminences flamandes de s’en prendre au parti. Gwendolyn Rutte, présidente des libéraux flamands, Bart De Wever, bourgmestre d’Anvers, étudiants libéraux,  journalistes, ainsi que toute une flopée de ‘faiseurs d’opinion’ et d’universitaires se bousculent pour essayer de prouver que le PTB est une version belge du parti de Kim Il Sung ou que Peter Mertens et Raoul Hedebouw sont les réincarnations de Staline.

301265 les affiches de mai 68Dénonciation du stalinisme

Par le passé déjà, le PTB s’est distancié de Staline et du stalinisme à plusieurs reprises ; orientation qu’il a encore confirmée ces dernières semaines. Preuve que le PTB est un parti en pleine évolution et qu’il s’éloigne des idées de son fondateur décédé il y a plusieurs années, Ludo Martens. Nous qui représentons une tradition marxiste antistalinienne de longue date, nous ne pouvons qu’applaudir ce changement.

Révolution/Vonk, la section belge du la TMI, soutient sans ambiguïté le PTB contre les attaques de la droite. L’enjeu dépasse de loin le seul Parti du Travail de Belgique : c’est toute la gauche qui se trouve dans le viseur de cette nouvelle chasse aux sorcières.  En faisant l’amalgame entre le marxisme et son odieuse falsification, le stalinisme, la droite espère détourner des idées du socialisme révolutionnaire ceux qui cherchent aujourd’hui une alternative au système.

La Flandre à gauche

L’élément déclencheur de cette charge contre le PTB en Flandre fut la participation –appréciée par le public- de Raoul Hedebouw, le porte-parole bilingue du parti, au populaire programme de télévision, « De Slimste Mens ». A cette occasion, Raoul Hedebouw  a été présenté comme “communiste” sans que cela provoque la moindre crise d’urticaire chez les téléspectateurs de la chaîne privée Vier. A l’exception, évidemment, de Gwendolyn et Bart...

Le succès commercial du nouveau livre de Peter Mertens, Graailand, en tête des ventes en Flandre depuis sa sortie, a ajouté au malaise de l’establishment. ‘Est-il donc possible que la Flandre vote à gauche, voire très à gauche ? La frontière linguistique ne serait donc pas infranchissable pour le PTB ?’ Il y  a quelques mois encore, Bart De Wever s’appuyait sur le succès du PTB dans les sondages en Wallonie et à Bruxelles pour renforcer sa thèse sur l’existence d’un pays composé de ‘deux démocraties’. D’un côté la Flandre qui vote en majorité pour la droite, immunisée contre les idées de gauche, et de l’autre la Wallonie historiquement de gauche, ces deux parties du pays se séparant de plus en plus. Mais est-ce bien vrai ? Quelle est la signification profonde de cette campagne hystérique dans les médias contre le PVDA en Flandre, sinon un aveu de l’establishment que la Flandre populaire et ouvrière  peut être séduite par un vote à gauche, même très à gauche ? Les forces du statu quo se rendent compte que la domination des partis de droite en Flandre n’est pas si solide qu’il y paraît. La Flandre des nantis prend peur. Par cette campagne contre le PVDA,  l’élite vise à détourner, à effrayer les travailleurs flamands, les militants syndicaux, les milliers de personnes socialement engagées, les étudiants radicalisés de voter ou d’adhérer au parti de Peter Mertens et de Raoul Hedebouw. Nous pensons que cela ne va pas réussir. Cette campagne est un formidable cadeau de propagande pour les propositions du PTB.

Les sondages les plus récents, ceux de VTM/Het Laatste Nieuws, justifient pleinement les inquiétudes de la droite et de la social-démocratie et confirment aussi notre analyse. Pour la première fois, le PVDA perce en Flandre et obtiendrait 3 députés. Dans toute la Belgique, le PTB/PVDA passerait de 2 à 13 députés fédéraux.  C’est le résultat d’une radicalisation politique certaine vers la gauche. Si ces chiffres se confirment dans les urnes, aux élections locales et fédérales, le PTB deviendra le 3e parti en Wallonie détrônant ainsi le CDH. Ce sera tout simplement…historique.

Un front progressiste, mais pour rompre avec l’austérité

Mais cette ‘nouvelle peur du rouge’ cache un autre message, adressé cette fois-ci au sp.a et à Groen : « n’envisagez surtout pas de former une coalition avec ces communistes sanguinaires ! » Car, oui, dans des villes comme Anvers, il est possible de détrôner la droite avec une coalition ‘progressiste’ composée du sp.a, de Groen et du PVDA. Cette alternative pourrait se concrétiser  lors des prochaines élections locales en 2018. Si tel était le cas, le centre de gravité politique en Flandre se déplacerait vers la gauche.

 Le programme d’une telle coalition est naturellement ce qui déterminerait son caractère véritablement ‘alternatif’. L’avenir d’une nouvelle majorité de gauche dépendrait également de sa capacité à mobiliser la population pour résister aux forces établies.

D’expérience, nous connaissons les faiblesses et les capacités de reniement du sp.a et de Groen. Il reste encore à voir comment le PTB pourrait faire la différence au sein d’une telle coalition. Mais la droite en Flandre, et donc aussi dans le reste du pays, s’en inquiète suffisamment pour ne pas vouloir les laisser tenter l’expérience.

L’opération semble porter ses fruits en divisant le sp.a sur la question d’une coalition avec le PVDA. Un certain nombre de dirigeants de ce parti s’opposent maintenant ouvertement à une telle perspective alors que d’autres semblent miser sur ce ‘front progressiste’. Nous pensons qu’un tel front progressiste doit se faire avec un programme qui mette fin aux privatisations et renationalise/remunicipalise tout ce qui a été vendu au privé, avec des investissements massifs pour l’expansion des services publics et la diminution des coûts pour les usagers, une réduction de la durée hebdomadaire du travail et une amélioration générale des conditions de travail du personnel. Pour financer un tel programme, on ne pourra compter ni sur la bienveillance des banques ni sur celle du gouvernement régional ou fédéral. Il s’agira également de mettre fin à l’étranglement des finances publiques par la dette : elle devra être annulée pour pouvoir financer un programme audacieux d’investissements sociaux et écologiques.

Plus largement, nous pensons que toute tentative sérieuse de réforme sociale au niveau local, régional ou fédéral, butera contre les frontières de la crise du capitalisme. L’expérience récente du gouvernement de Tsipras en Grèce prouve que les bonnes intentions ou la simple volonté de mettre fin à l’austérité sont insuffisantes. Le capitalisme, aujourd’hui, ne peut plus se permettre des réformes sociales progressistes. La crise est bien trop profonde pour que le système puisse digérer de tels changements. Le PTB/PVDA met en avant un programme de réformes sociales, tout comme le faisait Syriza en Grèce avant sa victoire électorale. Pour les mettre en œuvre, il sera nécessaire de mener une lutte implacable contre le ‘mur de l’argent’ et d’engager une rupture avec le capitalisme. Il s’agit donc d’envisager, comme une perspective très concrète, la construction d’une société socialiste. On pourrait résumer cela en disant : pas de réformes sociales durables sans révolution socialiste. C’est la différence entre une vision réformiste des réformes sociales et une vision marxiste et révolutionnaire des réformes.  Voilà un enseignement important pour toute la gauche belge, le PTB inclus.

Le PTB a réussi à donner une expression politique aux frustrations d’en bas, il a trouvé un grand soutien auprès des militants syndicaux et avance fortement dans les sondages. En bref : le PTB a le potentiel pour défier le système. Voilà les raisons des attaques de ‘ceux d’en haut’.